N° 69 du Canard Enchaîné – 24 Octobre 1917
N° 69 du Canard Enchaîné – 24 Octobre 1917
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la ville aux tramways
Marseille selon Whip, ce n’est pas le Vieux-Port, ni la Canebière, ni même le mistral : c’est une forêt de tramways jaunes, sifflants et bondés, où l’on se bouscule, s’accroche aux tampons et où le receveur, surnommé « le vieil hibou », arrache deux sous aux passagers récalcitrants. Dans ce tableau étourdissant, le Canard transforme la cité phocéenne en capitale universelle du tumulte… et de l’ironie.
PÉRIODE TROUBLÉE, dessin de Lucien Laforge
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Dans son article du 24 octobre 1917, Whip livre une chronique marseillaise qui relève autant du reportage que de la satire. Observateur goguenard, il feint de rechercher le mythique « lac Ulbute » — clin d’œil à un proverbe local — mais se retrouve pris dans une avalanche de tramways. Plus qu’un décor pittoresque, ce réseau anarchique devient le véritable cœur battant de la ville. Les véhicules jaunes ne se contentent pas de transporter : ils assourdissent, désorientent, et composent une symphonie moderne où la foule est instrument et spectatrice à la fois.
La description se mue vite en scène quasi théâtrale. Whip campe une galerie de personnages hauts en couleur : les ouvriers harassés qui envahissent le tram à la sortie de l’atelier, les passagers suspendus à l’extérieur, accrochés comme des fruits mûrs, et surtout le fameux receveur, le « vieil hibou », qui houspille en provençal ou en italien pour obtenir son dû. C’est lui le héros malgré lui, remportant sa petite victoire contre des passagers riches en billets mais pingres en sous.
Ce récit, sous ses airs de fantaisie folklorique, illustre un ressort central du Canard enchaîné : tourner en dérision les faux monuments et montrer où se cache la vraie comédie humaine. Ici, Marseille n’est pas magnifiée par ses paysages de carte postale, mais par ses tramways grinçants et son tumulte populaire. Whip, fidèle à son style ironique et faussement naïf, transforme une expérience banale de transport urbain en apologue mordant sur l’anarchie joyeuse de la cité et sur la condition humaine en temps de guerre.

 
      



