N° 221 du Canard Enchaîné – 22 Septembre 1920
N° 221 du Canard Enchaîné – 22 Septembre 1920
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Sur les cafés
Dans son style ironique et gouailleur, Georges de La Fouchardière livre, en septembre 1920, une « conférence » sur les cafés parisiens. Entre typologie des établissements, portraits de clients et parodie de sociologie urbaine, il croque un monde où se rejoue toute la vie sociale et politique de la France d’après-guerre. Loin des fastes officiels, c’est dans ces lieux enfumés et bruyants que bat, selon lui, le vrai cœur de la République.
Le ratier à sa mémère, dessin de Bécan –
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L’article de Georges de La Fouchardière du 22 septembre 1920 est un exemple parfait de la veine satirico-sociologique que cultive Le Canard enchaîné depuis ses débuts. Présenté comme une « conférence » donnée à la Ligue antialcoolique, le texte détourne les codes du discours scientifique pour dresser une classification savoureuse des cafés et de leurs habitués.
La France de 1920 sort à peine de la Première Guerre mondiale et vit une période de reconstruction marquée par les tensions sociales, la vie chère et l’instabilité politique. Dans ce contexte, le café n’est pas seulement un lieu de loisir : c’est un espace central de la sociabilité française, où se croisent ouvriers, fonctionnaires, journalistes, commerçants et politiciens. La Fouchardière le sait bien, et en fait le théâtre burlesque d’une comédie humaine.
Avec un humour féroce, il distingue d’abord plusieurs « types » de cafés : celui « où je trouverai le type qui me doit cent sous », celui « où je suis sûr de ne pas rencontrer ma femme », ou encore celui « où je suis certain de ne pas rencontrer mon mari ». Par ces formules absurdes, il tourne en dérision la prétention scientifique de son propos, tout en reflétant la vérité sociale des cafés : lieux de dettes, d’infidélités et de rendez-vous clandestins.
La description du personnel est à l’avenant : la caissière, « buste placé dans un corsage » qui attire l’œil des passants, ou le garçon de café, véritable gymnaste des plateaux, transformé en sémaphore vivant. Derrière la caricature, on retrouve la fascination pour cette figure typiquement parisienne, symbole d’une modernité faite de vitesse, de bruit et de gestuelle mécanique.
Enfin, La Fouchardière élargit sa satire en évoquant le rôle social et économique des cafés. Ces lieux, dit-il, « c’est là qu’on refait l’armée et le Parlement », autrement dit qu’on débat, qu’on critique et qu’on rêve d’une autre société. La formule, sous sa légèreté, traduit une vérité politique : dans la France de l’entre-deux-guerres, le café reste l’agora démocratique par excellence, où s’élaborent les idées et les révoltes.
En 1920, alors que la République peine à retrouver sa stabilité et que la vie parlementaire suscite lassitude et sarcasme, La Fouchardière rappelle avec humour que la vraie politique ne se fait pas à l’Élysée ni au Palais-Bourbon, mais autour d’un zinc, d’un verre de blanc ou d’un café noir. Son article est à la fois un pastiche et une chronique sociologique : il révèle comment Le Canard enchaîné transformait des scènes du quotidien en paraboles satiriques sur la société française.





