Expédition de votre Canard enchainé

EXPEDITION SOUS 24H

Envoi soigné de votre Canard enchainé

ENVOI SOIGNÉ

Paiement sécurisé pour l'achat de votre Canard enchainé

PAIEMENTS SÉCURISÉS

Livraison offerte de votre Canard enchainé à partir de 15€ de commande

LIVRAISON OFFERTE À PARTIR DE 15€

Paiement sécurisé pour l'achat de votre Canard enchainé

PAIEMENTS SÉCURISÉS

N° 819 du Canard Enchaîné – 9 Mars 1932

N° 819 du Canard Enchaîné – 9 Mars 1932

59,00 

En stock

Aristide

Mars 1932 : Aristide Briand s’éteint, et Le Canard enchaîné pleure — à sa manière. Dans « Aristide », Pierre Scize écrit un hommage bouleversant et rageur, tandis que deux billets féroces célèbrent l’hypocrisie du monde : au Creusot, on illumine pour les canons Schneider ; à Shanghai, on feint la trêve. Entre ferveur et sarcasme, un adieu lucide à celui qui promit : « Tant que je serai là, il n’y aura pas la guerre. »

Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix

En stock

Canard au naturel
Canard en chemise

Chaque numéro ou journal anniversaire, peut être inséré dans une pochette cadeau au choix, d’un très beau papier pur coton, comportant une illustration originale spécialement réalisée pour COUAC ! par Fabrice Erre ou Laurent Lolmede, ou pour les premiers lecteurs du Canard Enchainé par Lucien Laforge.

Cette pochette cadeau assure aussi une conservation optimale du journal : un papier au PH neutre limitant la dégradation des vieux journaux sur la durée.

Décliné en 4 pochettes originales (Gratuite)
Pochette offerte pour toutes éditions d’un prix supérieur à 59€
Visualiser les illustrations en cliquant sur le nom des auteurs

Canard laqué

Enchâssé entre deux feuilles d’acrylique (plexiglass extrudé*) il s’exposera aux regards sous son plus beau jour.

Les propriétés anti-UV de ce plexiglass de 2 mm lui assureront une conservation optimale limitant le jaunissement.

Le maintien entre les deux plaques, avec 8 petites pinces nickelées, supprime la vue des plis ainsi que leurs effets indésirables. Les marges autour du journal sont de 2 cm et sont ajustées au format de l’édition, qui a varié au fil des décennies.

*Transparence, légèreté, résistance aux chocs et aux UV

Cette présentation est déclinée en 2 options :

Plexi transparent (30€) servant de fond, plus discret mais élégant il permet aussi la vision de la dernière page du journal.
Plexi noir (35€) servant de fond, il met en valeur la teinte et le format du journal, s’harmonisant parfaitement avec les encres noires de la page.

9 mars 1932 : Aristide Briand, la lumière et les hyènes

Le 7 mars 1932, Aristide Briand s’éteint à Cocherel, au terme d’une vie politique vouée à la conciliation. Le lendemain, la France se découvre orpheline d’un pacificateur, et le Canard enchaîné publie l’un de ses plus beaux textes d’hommage : « Aristide », signé Pierre Scize. Un hommage sans pathos, mais vibrant de colère et de lucidité. Dans le même numéro, deux billets lacèrent d’un trait d’ironie la réaction du monde industriel et diplomatique : « On illumine au Creusot » et « Une trêve à Changhaï ». Le contraste est saisissant : d’un côté, le deuil d’un humaniste ; de l’autre, la jubilation des marchands de canons.

Scize ouvre sa chronique sur une note de dérision maîtrisée. Il imagine, non sans sarcasme, ce qu’auraient écrit les polémistes de droite : qu’un Marin, un Maurras ou un Franklin-Bouillon auraient pu accuser quelqu’un « d’avoir empoisonné l’eau de Vittel du président ». Le ton est donné : refus du sensationnalisme, mais rage froide contre ceux qui ont traîné Briand dans la boue. Le journaliste ne s’adresse pas à un homme d’État, mais à un compagnon de route, un « doux pêcheur à la ligne de Cocherel » auquel le pays avait confié ses espoirs. « Nos espoirs », écrit-il, « qu’on va ensevelir avec lui ».

Le texte, écrit dans un souffle, oscille entre élégie et réquisitoire. Scize ne dissimule pas les failles de Briand — ses revirements, son « inégalité » — mais salue sa ténacité : « Il a tenu selon ses forces et jusqu’au bout. » Face à « la meute de la haine, de la sottise, du mensonge », il est resté debout, prononçant cette phrase qui résonne comme un serment : « Tant que je serai là, il n’y aura pas la guerre. » Ces mots, prononcés au lendemain du pacte Briand-Kellogg (1928), prennent sous sa plume la dimension d’un testament.

Mais l’éloge tourne vite à la dénonciation. Scize ne se trompe pas de coupables. « Ah non, nous n’accuserons personne de sa mort », écrit-il, avant de préciser : « Nous savons de quoi il meurt. De la méchanceté des hommes. Du triomphe des brutes. De l’apothéose où l’on voit prospérer les affairistes, les exploiteurs, les requins. » La violence de ces lignes, d’une noirceur lucide, dit tout du désenchantement des années trente : la mort de Briand marque le triomphe des cyniques et des bellicistes. La paix s’éteint avec lui, et les vautours s’apprêtent à danser sur sa tombe. « Tout à l’heure, sur cette tombe entrouverte, des hyènes vont s’accroupir et s’assouvir joyeusement. » Rarement Le Canard aura écrit avec une telle gravité.

Scize n’épargne pas les noms. Maurras, Daudet et leurs disciples sont directement visés : les réactionnaires de l’Action française, qui depuis des années accablaient Briand de leurs injures, sont dépeints comme des « vampires » incapables de respect pour la mort. Et le journaliste conclut en appelant les vivants à reprendre le flambeau : « Que les plus dignes ramassent le bâton qu’il a laissé choir. La route est longue et le ciel menaçant ? Qu’importe ! Adieu, grand-père ! Et rendez-vous à l’aube ! » Une ultime formule qui sonne comme un appel à la résistance morale contre la barbarie montante.

Les deux billets qui accompagnent cet hommage prolongent la charge sous un angle plus cru. Dans « On illumine au Creusot », Le Canard imagine que la mort de Briand — l’artisan du désarmement et de la paix — déclenche une réjouissance au siège de la maison Schneider, fournisseur d’armes français. « Le drapeau du château de M. Schneider, en berne depuis Locarno, a été joyeusement hissé. » Et le patron de conclure : « Maintenant, nous allons enfin pouvoir faire de la belle besogne. » L’ironie est au vitriol : la mort du pacifiste devient une bénédiction pour les fabricants d’obus.

Le billet suivant, « Une trêve à Changhaï », pousse la satire jusqu’à l’absurde : à l’annonce de la mort de Briand, Japonais et Chinois auraient cessé de se battre « en signe de deuil ». L’humour macabre révèle l’hypocrisie des grandes puissances, promptes à louer la mémoire d’un homme qu’elles n’avaient cessé d’ignorer ou d’entraver.

Dans cet ensemble, Le Canard enchaîné livre une page d’anthologie : celle d’un pacifisme blessé mais pas résigné. Le ton grave de Scize, la férocité des billets, la justesse des cibles — Schneider, Maurras, les « requins » — font de ce numéro du 9 mars 1932 une veillée funèbre lucide. Au moment où la paix vacille, l’oiseau moqueur baisse la tête, non pour prier, mais pour promettre qu’il n’oubliera rien.