N° 1022 du Canard Enchaîné – 29 Janvier 1936
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Dépréciation de la Lyre – Dans cet article, Jean Galtier-Boissière critique la pratique de certains poètes riches qui financent eux-mêmes la publication de leurs œuvres, ainsi que l’exploitation de l’actualité politique par ces mêmes poètes pour attirer l’attention. Il se concentre particulièrement sur un numéro spécial de la revue « Phalange », relancée par le poète millionnaire M. Godoy, et dédiée à la glorification de Mussolini, du fascisme italien et de la guerre d’Éthiopie.
Galtier-Boissière commence par souligner l’ironie de la relation entre les éditeurs et les poètes. Contrairement à la croyance populaire, les éditeurs aiment les poètes, mais surtout ceux qui peuvent payer leurs frais de publication. Étant donné que les recueils de poésie ne se vendent généralement pas bien, les poètes doivent souvent financer eux-mêmes l’impression de leurs œuvres. C’est dans ce contexte que M. Godoy, multimillionnaire et poète, décide de relancer la revue « Phalange ».
Pour attirer l’attention sur sa revue, M. Godoy choisit de consacrer un numéro spécial à Mussolini et à la guerre d’Éthiopie, en pleine période où le monde est outré par les actions du dictateur italien. Galtier-Boissière ironise sur cette initiative, notant que M. Godoy a réussi à réunir une « élite » d’écrivains pour chanter les louanges de Mussolini à un moment où son régime est largement condamné.
Parmi les contributeurs, Galtier-Boissière mentionne :
– M. J. Germain : Ancien combattant et écrivain, il décrit sa visite au Musée de la Révolution fasciste à Rome, accompagnée de Marinetti, le fondateur du futurisme et propagandiste fasciste.
– M. L.L. Sosset : Un Belge qui critique violemment l’attitude de son propre pays envers les sanctions contre l’Italie, louant Mussolini de manière excessive.
– Un poète suédois : Qui, contrairement à la majorité de ses compatriotes, soutient l’agression italienne en Éthiopie, même après le bombardement d’une ambulance de la Croix-Rouge contenant des blessés abyssins et des médecins suédois.
M. Godoy lui-même contribue au numéro, dépeignant Mussolini comme un homme de « Bonté » et de « simplicité ». Il raconte une anecdote où Mussolini corrige poliment un officier sur l’usage du couteau à poisson, pour illustrer sa « modestie » et son souci des conventions sociales.
Galtier-Boissière conclut en soulignant l’absurdité des louanges des contributeurs, particulièrement celles de M. Godoy, dont les éloges semblent déconnectées des réalités brutales de la guerre. Il contraste les « caresses embaumées » des idéaux poétiques avec les souffrances bien réelles des femmes et des enfants éthiopiens sous les bombardements italiens.
Ce texte satirique de Jean Galtier-Boissière critique non seulement la pratique des poètes fortunés finançant leur propre renommée, mais aussi l’usage cynique de la poésie pour glorifier des régimes oppressifs, exposant l’hypocrisie et la déconnexion de certains intellectuels de leur époque.
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