Cet article de R. Tréno, intitulé « Comme si vous y étiez », se moque habilement de la fascination morbide et du voyeurisme qui entourent la fin de vie de personnalités comme Pétain, tout en comparant cet engouement à celui que suscite la momie de Lénine à Moscou. Tréno ridiculise les grands hebdomadaires français qui rivalisent pour obtenir « l’exclusivité mondiale » de la couverture de l’agonie de Pétain, transformée en spectacle national. L’humour réside dans cette description satirique d’une société prête à transformer la mort en divertissement, à l’image de la queue pour voir Lénine dans son cercueil de verre.

L’auteur se moque également des reporters français envoyés sur « l’île de la Mort lente » pour suivre cet événement avec une absurdité palpable, comparant cette mission au célèbre roman de Jules Verne ou à une épopée biblique. Il n’hésite pas à lancer des piques sarcastiques à Me Isorni, l’avocat de Pétain, et à sa tentative d’exorciser toute possible réhabilitation in extremis du maréchal par De Gaulle.

Avec son ironie mordante, R. Tréno peint un tableau grinçant de la presse et de la société qui transforment des moments tragiques en une sorte de cirque médiatique. On y trouve également une critique sous-jacente du décalage entre l’importance accordée à la mort de Pétain et le silence relatif entourant les véritables martyrs de la Seconde Guerre mondiale, comme les victimes de Victor Basch et Marx Dormoy, laissant entendre que la mort des héros ne suscite pas autant d’intérêt que celle des figures controversées.