N° 2830 du Canard Enchaîné – 22 Janvier 1975
N° 2830 du Canard Enchaîné – 22 Janvier 1975
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Giscard des pingres
Quand la « république populaire » mène grand train
Le 22 janvier 1975, Claude Angeli s’amuse du contraste entre la « république populaire » que promet Valéry Giscard d’Estaing et le train de vie du couple présidentiel. Derrière les images d’austérité et de proximité que Giscard cultive, Le Canard dévoile le décor : des châteaux, des hectares de terres à Authon et à l’Étoile, des forêts, et même des travaux financés grâce à des arrangements fiscaux avantageux. Pendant que l’opinion subit inflation et rigueur, Giscard joue au châtelain, multipliant les acquisitions discrètes. L’article croque avec ironie un président qui prêche la simplicité mais s’entoure de privilèges aristocratiques.
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Giscard des pingres
Le double langage d’un président châtelain
Avec son article du 22 janvier 1975, Claude Angeli illustre l’un des paradoxes fondamentaux du septennat giscardien : un président qui se veut proche du peuple tout en menant la vie d’un aristocrate. Intitulé « Giscard des pingres », le texte dévoile les propriétés du couple présidentiel et la manière dont elles sont aménagées. Authon, l’Étoile, autant de domaines campagnards qui témoignent moins d’un goût champêtre que d’une fortune soigneusement consolidée.
Angeli part de l’image officielle, celle d’un Giscard « simple », qui veut rompre avec le faste gaullien et pompidolien, pour montrer l’envers du décor : l’entretien des domaines, les hectares acquis, les aménagements faits sous couvert d’économies, mais qui représentent en réalité un luxe inaccessible pour la majorité des Français. Au moment où l’inflation galope, où le libéralisme devient pour beaucoup une épreuve quotidienne, l’ironie du Canard fait mouche : « Le libéralisme, c’est aussi une question de centimes. »
L’article met également en lumière la duplicité d’un discours politique qui se veut moderne et populaire, mais qui demeure arrimé aux réflexes sociaux de la grande bourgeoisie. Giscard, loin de partager les sacrifices qu’il prêche, s’offre le confort discret des notables, entouré de privilèges fonciers et fiscaux. Les hectares de forêts et de terres accumulés par le couple sont le signe d’un capitalisme de rente, hérité du XIXe siècle plus que d’une « république des citoyens ».
La satire atteint son sommet avec les détails sur l’épouse du président, Anne-Aymone Giscard d’Estaing, décrite dans son rôle de châtelaine attentive, apportant « une dernière touche » de bon goût aristocratique aux résidences. Ici, Angeli manie une ironie sociale : ce qui est présenté comme de la simplicité bourgeoise apparaît comme un raffinement aristocratique déplacé au regard du contexte économique.
Enfin, l’article se conclut sur une critique plus large : le président qui prétend représenter un peuple moderne et égalitaire continue de reproduire les signes extérieurs d’une société figée, héritée des hiérarchies anciennes. Giscard voulait « gouverner autrement », mais le Canard rappelle qu’il gouverne toujours « d’en haut », au sens propre comme au figuré.
Ainsi, ce papier de Claude Angeli incarne parfaitement le rôle de vigie satirique du Canard enchaîné : mettre à nu les contradictions d’un pouvoir qui prêche l’austérité au peuple tout en savourant les privilèges de caste. Giscard, en janvier 1975, apparaît non pas comme l’homme d’une « république populaire », mais comme le digne héritier des châtelains qu’il feint de tourner en dérision.