N° 2719 du Canard Enchaîné – 6 Décembre 1972
N° 2719 du Canard Enchaîné – 6 Décembre 1972
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Le Canard et les Dossiers qui font écran
Quand l’ORTF prétend inviter au débat mais choisit surtout qui ne doit pas en être, Le Canard hausse le ton. André Ribaud démonte la mise en scène des “Dossiers de l’écran”, où l’absence du palmipède n’a rien d’un hasard mais tout d’un écran de fumée.
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Le Canard et les Dossiers qui font écran
La télévision sous contrôle et la presse muselée
Dans son article du 6 décembre 1972, André Ribaud revient sur un épisode révélateur du rapport tendu entre la presse libre et la télévision d’État. À l’occasion d’une émission des Dossiers de l’écran, diffusée sur l’ORTF et consacrée à la presse, Le Canard enchaîné avait été soigneusement écarté du débat. Alain Jérôme, présentateur de l’émission, avait bien pris contact avec la rédaction, mais l’invitation n’avait jamais abouti. Résultat : un débat sur la liberté de la presse… sans l’un de ses acteurs les plus incisifs.
Pour Ribaud, l’exclusion n’était pas fortuite mais symptomatique d’un système verrouillé. Sous prétexte de “prudence” et de “réserve”, l’ORTF privilégiait les intervenants jugés inoffensifs, ceux qui parlaient doctement d’“information économique” mais évitaient soigneusement d’évoquer l’intoxication publicitaire ou les compromissions du pouvoir. Ainsi, la critique sociale portée par Le Canard n’avait pas sa place dans une télévision où l’on préférait le confort des débats aseptisés, calibrés, “ripolinés” comme l’écrit Ribaud.
Cette absence, transformée en objet de débat par certains députés, devint pour Le Canard une manière de rappeler son rôle spécifique. “Informer les citoyens” ne consiste pas seulement à commenter poliment l’actualité, mais aussi à la gratter là où ça fait mal. En refusant d’être le figurant d’un pseudo-débat télévisé, le palmipède revendiquait sa liberté de ton et sa mission première : enquêter, dénoncer et rire jaune au besoin.
Ribaud souligne enfin le piège de ces “Dossiers” : sous couvert de pluralisme, ils neutralisaient la critique. En excluant Le Canard, l’ORTF espérait que le silence tiendrait lieu de réponse. Mais, fidèle à lui-même, le journal sut transformer cette mise à l’écart en un nouvel angle d’attaque, rappelant que la satire reste une forme de journalisme… et peut-être la plus nécessaire.
En 1972, la télévision d’État voulait encore faire écran ; Le Canard, lui, persistait à fissurer la façade.