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Dictionnaire CANARD 1962

Dictionnaire CANARD 1962

19,90 

En stock

Dictionnaire Canard 1962

Numéro spécial, sixième de la série. Supplément vendu à l’époque avec le numéro du 29 Novembre 1961. Définitions et histoires les plus satiriques et anticonformistes.

La Constitution « taillée sur mesure » : le Dico Canard dissèque le gaullisme (1961)

Fin 1961, le Dictionnaire du Canard 62 croquait la toute jeune Ve République dans un article féroce signé André Ribaud : « Ma Constitution ». Derrière l’humour et les calembours, c’est un véritable procès en règle de la loi fondamentale de 1958, façonnée pour et par de Gaulle. Le Canard enchaîné, armé de ses plumes et de ses caricatures, dénonce une Constitution « bien troussée »… mais surtout taillée à la botte du général. Retour sur une satire qui, soixante ans plus tard, sonne encore d’une troublante actualité.

In 8 format 20 X 13 cm, broché. Couverture souple. Comporte de nombreuses illustrations, photos et dessins humoristiques en noir & blanc, dans et hors textes. 96 pages. Les plats peuvent présenter des traces d’usures ou frottements, l’intérieur est frais avec parfois quelques rousseurs sans gravité.

Livré avec 4 signets originaux

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Le grand théâtre de 1958

Ribaud présente la Constitution comme une pièce montée par Michel Debré, sous l’inspiration directe de de Gaulle. Tout y est spectacle : « écrite et mise en scène » comme une comédie où les articles défilent tels des acteurs alignés dans une fausse solennité. Les consultations référendaires, les promesses de renouveau et les incantations gaullistes, tout cela ressemble pour le Canard à une « superproduction » taillée pour emporter l’adhésion des foules.

Dès la première colonne, le ton est donné : « Une Constitution bien troussée », mais surtout cousue de fil blanc, destinée à installer un pouvoir présidentiel exorbitant. Le Canard raille l’article phare, celui qui proclame que « le président de la République veille au respect de la Constitution ». Traduction libre de Ribaud : il peut la violer à loisir, tout en restant son propre gardien.


« A ma botte » : le président démiurge

Le cœur de la charge se concentre sur le pouvoir présidentiel. L’article 16, qui permet au chef de l’État de disposer de pouvoirs exceptionnels, est décrit comme une arme absolue, maniée « quand il le veut, pour le temps qu’il veut ». Ribaud moque l’absence de contrepoids : de Gaulle peut suspendre le Parlement, gouverner par ordonnance et concentrer les leviers sans autre limite que son propre bon vouloir.

Le jeu de mots « A ma botte ! » illustre la satire : la Constitution est devenue l’outil d’un président-botte, à la fois militaire, juge et bourreau. La caricature de Pol Ferjac, qui représente un « Gaulliath » massif et dominateur, renforce ce portrait d’un chef quasi monarchique.


Un Conseil constitutionnel « de cire »

L’autre cible privilégiée est le Conseil constitutionnel, ce « Conseil des eunuques » réduit à un rôle décoratif. Ribaud ironise : ces sages grassement rémunérés n’ont ni la mission, ni le pouvoir de s’opposer aux décisions présidentielles. Le Conseil, dit-il, « n’a rien à voir avec la Constitution », il n’a pas été inventé pour la protéger mais « pour faciliter la monocratisation du système ».

L’attaque est double : non seulement le Conseil est impuissant, mais il cautionne par son silence la personnalisation extrême du régime. Autrement dit, loin d’être un contre-pouvoir, il se transforme en instrument de légitimation.


Le Parlement relégué

Le Canard n’oublie pas non plus de rappeler le sort du Parlement, réduit à un rôle mineur. Même si, concède Ribaud, il garde formellement ses prérogatives budgétaires, il ne peut plus empêcher grand-chose. Les députés votent les crédits, mais l’Élysée les contourne ou les impose par d’autres biais. Exemple grinçant : la création d’un poste d’« inspecteur général des monuments aux morts », refusée par le Parlement mais tout de même financée par les crédits spéciaux de l’Élysée. La démonstration est implacable : la Ve République contourne les règles au nom d’une grandeur autoproclamée.


Une mécanique bien huilée

« Oui, c’est une parfaite mécanique », écrit Ribaud. Mais c’est une mécanique au service d’un seul homme, une machine taillée sur mesure pour de Gaulle. La satire ne se contente pas de décrire : elle met en garde. Derrière l’humour et les dessins de Monier ou Ferjac, c’est une critique frontale du déséquilibre institutionnel qui place le président au-dessus de tout.

Le Canard rappelle avec ironie que la Constitution de 1958 a introduit un « dieu en trois pouvoirs », mais que ce dieu-là n’a rien de trinitaire : tout converge vers de Gaulle. « Le président peut tout, et il ne doit de comptes à personne », conclut Ribaud.


Héritage satirique

Relire cet article du Dictionnaire du Canard 62, c’est mesurer la lucidité d’une rédaction qui, dès 1961, avait saisi la dérive monarchique du nouveau régime. Entre sarcasmes et caricatures, le journal dresse un réquisitoire d’une clairvoyance redoutable. En dénonçant le glissement d’une République parlementaire vers une présidence hypertrophiée, le Canard rappelait aux Français la vigilance nécessaire face à toute concentration de pouvoir.


En somme :
Le texte de Ribaud n’était pas qu’une satire drôle et piquante. C’était un avertissement. Derrière les bons mots, une leçon de démocratie : lorsqu’un pouvoir se veut absolu, il ne reste plus grand-chose des contrepoids censés le limiter.