N° 121 du Canard Enchaîné – 23 Octobre 1918
N° 121 du Canard Enchaîné – 23 Octobre 1918
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🖋️ H.-P. Gassier, « Décidément, c’est bien la fin »
À l’automne 1918, les communiqués officiels annoncent chaque semaine que la guerre « touche à sa fin ». Gassier en fait une caricature : son personnage, las et désabusé, répète la formule avec un scepticisme ironique. Le titre est repris mot pour mot, mais vidé de sa solennité. L’humour réside dans la lassitude : plus on annonce la fin, moins on y croit. Douglas souligne ici que le Canard déjoue les illusions triomphalistes en donnant voix à la méfiance populaire. Cette caricature, à la fois drôle et amère, capture l’état d’esprit d’un pays usé par quatre années d’attente.
1918 : la classe 30 en pleurs
Le 23 octobre 1918, à quelques semaines de l’armistice, Le Canard enchaîné publie un dessin de Raoul Guérin intitulé “Le grand chagrin de la classe 30”. La guerre touche à sa fin, et déjà l’humour noir se tourne vers ceux qui, trop jeunes pour avoir combattu, pleurent de n’avoir pas “leur guerre”. L’ironie est mordante : dans un monde où des millions de soldats ont souffert, on imagine de petits garçons sanglotant parce qu’ils n’auront pas leur part de gloire ensanglantée.
Mauvaise opération, dessin de Opnor – dessin de Alexandre, sans titre sur 4 colonnes
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Octobre 1918 : l’absurde héritage de la guerre
Quand le Canard raille les futures générations
Nous sommes à la toute fin de la Grande Guerre. Le 23 octobre 1918, Le Canard enchaîné publie en page 4 un dessin de R. Guérin intitulé “Le grand chagrin de la classe 30”. L’image frappe par son cynisme : un vieil homme interroge deux enfants en pleurs. “Pourquoi pleurez-vous, mes petits ?” demande-t-il. Et les bambins de répondre : “Parce qu’on nous avait dit qu’il n’y aurait plus de guerre… et voilà qu’il n’y en a plus !”
Le trait est cruel, mais il exprime une vérité profonde : la guerre, devenue rite de passage pour une génération entière, risque de se perpétuer comme modèle. Le Canard enchaîné met en lumière, avant même l’armistice, ce paradoxe : au moment où les adultes aspirent à la paix, la culture guerrière est si enracinée qu’on en vient à imaginer les enfants frustrés de ne pouvoir, à leur tour, endosser l’uniforme.
Ce gag, en apparence léger, traduit une inquiétude sur l’avenir. Les journalistes du Canard sentent déjà que l’armistice ne suffira pas à conjurer le spectre d’une prochaine guerre. En pleurant leur “manque de guerre”, ces enfants annoncent malgré eux que l’esprit militariste continuera de hanter les décennies suivantes. L’humour sert ici de révélateur : derrière le rire, une interrogation lancinante — et si la “der des der” n’était pas la dernière ?
L’ironie du Canard prend d’autant plus de relief qu’elle surgit dans un contexte d’euphorie contenue : les armées alliées avancent, l’Allemagne vacille, la fin est proche. Mais au lieu de célébrer simplement la victoire, le journal préfère souligner l’absurdité d’un système où l’on inculque aux enfants que la guerre est une expérience nécessaire, presque enviable.
Ce dessin de R. Guérin est exemplaire de la méthode du Canard : refuser la solennité pour mieux dire l’essentiel. Tandis que la presse patriote exalte la victoire imminente, l’hebdomadaire satirique rappelle que la guerre laisse un héritage empoisonné. Le rire n’est pas seulement une soupape : il devient une arme critique. Et dès octobre 1918, l’ombre du “prochain conflit” plane déjà sur ses pages.
CELLE QU’IL EST INTERDIT DE NOMMER…
Un mal qui nous vient de Madrid
En la doulce France circule
Rares sont ceux qui ne l'ont pris
Le soldat, l'ouvrier, l’hercule
Et le moine sous sa cuculle
Et le marin qui rentre au port
Qu’il soit géant ou minuscule
La... l'agrippe et le tord.
Tous les cercueils sont hors de prix
S’en payer un mange un pécule
On enterre sous le ciel gris
De l’aube jusqu’au crépuscule
Tant que c’en devient ridicule
On n’a pas le temps d’être mort
Que le porteur qui vous bouscule
La... l’agrippe et le tord.
ENVOI
Prince, hélas ! On n’a pas vaincu le fléau. Or, la mort est sans mors
Et le monarque majuscule
La... l’agrippe et le tord.
Marcel ACHARD.
Ce texte poétique, publié dans cette édition et écrit par Marcel Achard, joue sur les mots pour évoquer la grippe espagnole, en respectant l'interdiction de l'époque de la nommer explicitement.