N° 1498 du Canard Enchaîné – 6 Juillet 1949
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UN CAS PENDABLE
Ce Roger Norest n’y coupera pas.
Roger Norest ? Il s’agit, vous le savez, de ce jeune bambochard parisien qui, le 20 mars dernier, sortant d’un bal avec son ami Laquiez, aussi ivre que lui, déroba (pour rire) une bouteille de lait.
Un agent survint et Laquiez fut tué.
Après quoi, la justice, comme il se doit, suivit son cours.
Entendez par là que Roger Norest fut poursuivi à la requête de l’agent 14.009 qui avait tué Laquiez.
Ça lui apprendra à sourire, à ce Norest !
Le tribunal correctionnel rendra son jugement le 16 juillet.
Roger Norest, répétons-le, n’y coupera pas.
Le tribunal, en effet, peut-il donner tort à un gardien de l’ordre ? Ce serait condamner l’Ordre lui-même.
Et alors, tout f…trait le camp. L’Ordre, la Société, tout… y compris l’Union française.
Vous vous demandez ce que l’Union française vient faire dans cette histoire. C’est pourtant bien simple.
Le procès Roger Norest, coupable d’avoir eu son ami tué par un agent, c’est ni plus ni moins le procès des parlementaires malgaches, actuellement en instance devant la Cour de cassation.
Les gardiens de l’ordre, à Madagascar, ont trucidé 85.000 indigènes (qui n’avaient même pas volé une bouteille de lait), avec la même virtuosité que l’agent 14.009 a fait passer de vie à trépas le jeune Laquiez.
Les parlementaires malgaches ont échappé au massacre, tout comme Roger Norest.
Vous commencez à comprendre.
Ce sont eux (les parlementaires malgaches) qui furent poursuivis et condamnés.
Vous voyez bien qu’on ne peut pas acquitter Roger Norest.
Ce serait infliger un désaveu cinglant aux juges de Tananarive. Ce serait reconnaître la culpabilité de l’agent 14.009 qui tua Laquiez et, du même coup, la culpabilité des gardiens de l’ordre de Madagascar.
Les juges de la XIVe chambre sauront accomplir leur devoir.
R. Tréno
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