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N° 1982 du Canard Enchaîné – 15 Octobre 1958

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39,00 

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V’là le général qui passe… … aux actes ?

Le dernier Salan dont on cause… Les premiers cocus, par R. Tréno – Un seul juste, par Morvan Lebesque – Le « Canard » au conclave – Fourchette au poing ! par Guy Verdot – B.B. et sa claque – Cinéma : « Les Tricheurs » de Carné, par Michel Duran – Canard-Variétés : Aznavour à l’Alhambra, par Gabriel Macé – 

Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix

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Canard au naturel
Canard en chemise

Chaque numéro ou journal anniversaire, peut être inséré dans une pochette cadeau au choix, d’un très beau papier pur coton, comportant une illustration originale spécialement réalisée pour COUAC ! par Fabrice Erre ou Laurent Lolmede, ou pour les premiers lecteurs du Canard Enchainé par Lucien Laforge.

Cette pochette cadeau assure aussi une conservation optimale du journal : un papier au PH neutre limitant la dégradation des vieux journaux sur la durée.

Décliné en 4 pochettes originales (5€)
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Canard laqué

Enchâssé entre deux feuilles d’acrylique (plexiglass extrudé*) il s’exposera aux regards sous son plus beau jour.

Les propriétés anti-UV de ce plexiglass de 2 mm lui assureront une conservation optimale limitant le jaunissement.

Le maintien entre les deux plaques, avec 8 petites pinces nickelées, supprime la vue des plis ainsi que leurs effets indésirables. Les marges autour du journal sont de 2 cm et sont ajustées au format de l’édition, qui a varié au fil des décennies.

*Transparence, légèreté, résistance aux chocs et aux UV

Cette présentation est déclinée en 2 options :

Plexi transparent (30€) servant de fond, plus discret mais élégant il permet aussi la vision de la dernière page du journal.
Plexi noir (35€) servant de fond, il met en valeur la teinte et le format du journal, s’harmonisant parfaitement avec les encres noires de la page.

Un seul juste, douze jurés et l’Algérie en embuscade
Morvan Lebesque & R. Tréno, Le Canard enchaîné, 15 octobre 1958

Quand Morvan Lebesque ouvre sa chronique page 2 sur « ces Douze hommes en colère », il prévient le lecteur : si un film ou une pièce électrise le public, c’est qu’il touche à autre chose qu’au simple “art”. L’Américain Reginald Rose, auteur du scénario, n’avait sans doute en tête qu’un bon “policier à suspense” pour Broadway et Hollywood. Mais, explique Lebesque, son histoire de jurés enfermés dans une salle de délibération s’est mise à “signifier quelque chose” pour des milliers de gens qui n’étaient venus que se distraire.

La pièce, créée quelques jours plus tôt à la Gaîté-Montparnasse sous le titre Douze hommes en colère, est alors l’adaptation française du film de Sidney Lumet, succès mondial de 1957. Douze jurés doivent décider du sort d’un gamin des faubourgs accusé d’avoir tué son père. Onze sont prêts à l’envoyer à la chaise électrique, un seul doute. C’est ce “fameux emmerdeur”, comme l’appelle Tréno en page 6, ce “trouble-confort” qui refuse le verdict emballé-pesé et impose la discussion jusqu’à l’acquittement, au nom du “doute valable”.

Les héros de notre temps

Lebesque sort du théâtre fasciné par ce juré sans nom, interprété par Michel Vitold. Il cherche son patronyme sur le programme et découvre qu’il n’en a pas. L’homme n’a qu’une fonction sociale, “architecte”, une trentaine d’années, tiré au sort pour juger un gosse qu’il ne connaît pas. C’est justement pour cela que, pour le chroniqueur, il devient un héros moderne.

Lebesque démonte alors le mot “héros”, saturé par les propagandes de la guerre froide, les mythologies militaires et les grandes “épopées” coloniales. Il distingue le vieux héroïsme, celui qui “met la flamme à toutes les pages de l’Histoire” et qui a souvent nourri des dictatures, des églises, des sectes, des régimes autoritaires. Et le nouveau : le héros d’aujourd’hui, écrit-il en substance, est celui qui refuse, qui doute, qui interroge, qui demande à voir. L’héroïsme vrai, c’est la vigilance de l’esprit, quotidienne, presque banale.

Dans la salle des jurés, cela donne deux types particuliers de “croyants” : le bourgeois raciste, persuadé que “tous ceux qui ne pensent pas comme nous sont de la racaille”, et le bigot qui confond morale et condamnation automatique. On voit très bien qui Lebesque vise, en 1958, au moment où la guerre d’Algérie envenime la France et où toute contestation de l’armée ou de la colonisation vaut aussitôt d’être classé traître ou “fellagha de salon”. À tous ceux qui refusent le débat, la pièce tend un miroir.

Alger, ce juré paranoïaque

R. Tréno, en page 6, enfonce le clou beaucoup plus frontalement. Après avoir raconté la mécanique dramatique, il lâche la phrase qui remet le théâtre au niveau de l’actualité brûlante : cette pièce, écrit-il, pourrait être jouée “en ce moment à Alger”, car Alger, ajoute-t-il, c’est “un peu (un peu beaucoup) ce juré paranoïaque dont la fureur du justicier s’accroît à mesure que le justiciable gagne du terrain”.

Difficile d’être plus clair : du côté de la colonie, la justice ressemble à ce juré acharné, prêt à fusiller pour sauver son monde. Le rappel de “l’affaire du bazooka” n’est pas là pour décorer. Un an et demi plus tôt, un attentat au bazooka a visé le général Salan à Alger ; le procès, ouvert en juillet 1958, met en cause un réseau d’extrême droite favorable à “l’Algérie française” et laisse flotter un parfum de complaisance judiciaire envers les activistes.

Tréno note d’ailleurs que les procès au théâtre et au cinéma donnent souvent une idée de la justice “plus passionnante” que les vrais prétoires. Manière de dire que, sur scène, la raison finit par l’emporter, alors que dans l’Algérie d’alors, ce sont plutôt les coups de crosse et les verdicts tordus qui dictent la loi.

Sous-hommes, surhommes et simples citoyens

Lebesque pousse l’analyse un cran plus loin avec le personnage le plus inquiétant du jury : le douzième, celui qui se moque de tout et serait prêt à voter coupable ou non coupable “au hasard”, pourvu que ça se termine vite et qu’il puisse aller au match de base-ball. Pour Lebesque, ce type est au-dessous même de l’homme de foi fanatique : c’est le “sous-homme” produit par la Société du spectacle et du bistrot, qui se fout de tout sauf de ses petits plaisirs.

Entre ce sous-homme et les “surhommes” gavés de certitudes idéologiques, le critique cherche l’équilibre fragile de la justice et de la raison. Son souhait final est limpide : que vienne un temps où il n’y aura “ni sous-hommes, ni surhommes, mais simplement des hommes dans toute la force du mot”. On est en octobre 1958, la Ve République vient d’être approuvée par référendum, de Gaulle s’installe, les généraux règnent sur l’Algérie et les tribunaux jonglent avec l’état d’urgence. Dans ce paysage, l’appel de Lebesque et le clin d’œil féroce de Tréno font de Douze hommes en colère bien plus qu’un polar de prétoire : une petite bombe politique, très exactement réglée à l’heure du Canard.