N° 2800 du Canard Enchaîné – 26 Juin 1974
N° 2800 du Canard Enchaîné – 26 Juin 1974
24,00 €
En stock
De l’épectase avant toute chose
Quand la théologie flirte avec le vaudeville
La mort du cardinal Daniélou, terrassé rue Dulong chez la blonde Mimi Santoni, inspire au Canard une avalanche de jeux de mots théologiques. Dans son éloge funèbre, un jésuite évoque « l’épectase de l’Apôtre », terme savant que Macé détourne aussitôt, promu « Révérend Père de la Compagnie de l’Épectase ». L’épiscopat s’indigne, mais trop tard : le mot a déjà changé de sens, désignant à la fois la tension mystique vers Dieu et… l’ultime extase d’un prélat en mauvaise posture. Entre indignation ecclésiastique et éclats de rire populaires, l’affaire consacre l’art du Canard à transformer le scandale en comédie grinçante.
Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix
En stock
De l'épectase avant toute chose, par Gabriel Macé
Jean Daniélou (1905 - 1974) est un prêtre jésuite, théologien de renom, connu pour ses positions très conservatrices, fait cardinal par le pape Paul VI en 1969 et élu à l'Académie française en 1972. Il meurt d'un arrêt cardiaque le 20 mai 1974 au domicile de Gilberte Santoni (56 rue Dulong, Paris 17ème), dite "Mimi", gente blonde de 24 ans, entraîneuse de cabaret. Situation embarrassante pour cet homme d'église. Officiellement, il était venu apporter de l'argent à cette femme pour lui permettre de payer un avocat capable de faire sortir son mari de prison.
Mme Santoni témoigne: "il est arrivé très essoufflé, a demandé dès son arrivée à ce que la fenêtre soit ouverte, s'est assis sur le divan puis s'est écroulé sur le sol; sa mort fut instantanée". Outre la police, dépêchée sur place, les jésuites ouvrent une enquête, pour établir les faits. Mais le silence qui va entourer cette affaire déclenche des soupçons et des railleries: la dame Santoni ayant reçu le saint homme en peignoir de bain, venait-il la confesser ?
Dans son éloge funèbre, le prêtre jésuite Xavier Tilliette indique que c'est "dans l'épectase de l'Apôtre qu'il est allé à la rencontre du Dieu vivant". L'épectase est un terme théologique qui désigne, pour les chrétiens, l'effort de l'âme vers la sainteté. Évidemment, le terme fit bien rire au Canard enchaîné, compte tenu des circonstances du décès du prélat, "Ah oui, l'épectase !",
déclenchant les protestations de l'épiscopat. Alors, le rédacteur en chef du Canard, Gabriel Macé - promu pour l'occasion Révérend Père de la Compagnie de l'Épectase - écrit dans le numéro 2800 du 26 juin 1974: "c'est toujours la même antienne, nous sommes des affreux jojos qui ne respectent pas la vie privée et qui se répandent en sous-entendus égrillards. En somme, nous avons voulu nuire à la mémoire du cardinal. On va même jusqu'à dire que nous avons voulu mener campagne contre le célibat des prêtres !".
Toujours est-il que Le Canard a contribué à élargir la signification de ce mot: l'épectase n'est plus seulement, chez les chrétiens, la tension de l'homme vers Dieu, mais la mort en tension de l'homme de Dieu dans l'extase...! SP
Mettez un chah dans votre moteur ! Majesté, on est à vos pieds ! par André Ribaud
Ce texte offre une satire cinglante de la relation entre la France et le chah d'Iran, Mohammad Reza Shah Pahlavi. L'auteur, André Ribaud, utilise un ton ironique pour décrire le changement de dynamique entre la France et le chah depuis sa dernière visite en 1961. Autrefois considéré comme un "souverain folklorique préféré des Français", le chah est désormais présenté comme un homme puissant et dominant, principalement en raison de sa richesse pétrolière. L'utilisation de l'expression "on est à ses pieds" illustre l'idée que la France se trouve désormais dans une position de dépendance vis-à-vis du chah en raison de son contrôle sur le pétrole. Cette dépendance est soulignée par le contraste entre l'accueil réservé au chah par de Gaulle et celui par Giscard d'Estaing. Alors que de Gaulle adoptait une attitude paternaliste, Giscard est présenté comme se soumettant volontairement au chah, renonçant à sa "simplicité publicitaire" pour lui rendre hommage. L'ironie est également présente dans la manière dont le chah minimise l'impact de la hausse des prix du pétrole sur l'économie mondiale, une déclaration qui semble satisfaire Giscard malgré ses propres difficultés à maîtriser l'inflation en France. Cette subordination apparente de Giscard au chah est soulignée par la répétition de l'expression "Oui, patron... Bien, patron", mettant en lumière le contrôle exercé par le chah sur la France en raison de sa richesse pétrolière. En conclusion, le texte met en lumière les implications politiques et économiques de la relation entre la France et le chah d'Iran, tout en soulignant l'ironie de la dépendance de la France à l'égard du pétrole iranien.