N° 2854 du Canard Enchaîné – 9 Juillet 1975
N° 2854 du Canard Enchaîné – 9 Juillet 1975
24,00 €
En stock
600.000 tonnes de poudre de lait invendables !
Agriculture européenne : quand l’abondance devient un fardeau
En juillet 1975, Le Canard enchaîné se penche sur une absurdité de la politique agricole commune : 600.000 tonnes de poudre de lait s’entassent dans les silos européens, invendables car jugées inconsommables par les humains. Après le vin impropre et le blé inutilisable, voici l’exemple parfait d’une Europe prisonnière de sa surproduction, où l’agriculture planifiée finit par produire de l’invendable. Hervé Terrace dénonce, avec ironie, une logique bureaucratique où l’on ne sait plus quoi faire des excédents : vendre aux Soviétiques, donner au Tiers-Monde, ou recycler pour l’alimentation animale. Une parabole grinçante sur l’échec d’un système à bout de souffle.
Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix
En stock
600.000 tonnes de poudre de lait invendables !
L’abondance absurde de la PAC mise en lumière
L’article d’Hervé Terrace dans Le Canard enchaîné du 9 juillet 1975 illustre de manière exemplaire l’impasse dans laquelle se trouve la Politique agricole commune (PAC). Alors que la pénurie hantait l’Europe d’après-guerre, c’est désormais la surabondance qui crée le scandale. Après le vin imbuvable et le blé immangeable, voici la poudre de lait : 600.000 tonnes s’entassant dans des entrepôts, impropres à la consommation humaine et trop coûteuses à écouler.
La force du papier réside dans sa manière de rendre palpable cette absurdité. Les excédents agricoles, fruit d’une politique de soutien aux producteurs, deviennent un poids mort. Terrace rappelle que la PAC, censée garantir un revenu stable aux agriculteurs, a généré un mécanisme pervers : les États achètent à prix garanti des productions dont ils ne savent plus que faire. Le résultat ? Des montagnes de beurre, des lacs de vin, et maintenant des silos de poudre de lait.
Le Canard appuie là où ça fait mal : la contradiction entre une Europe débordant de denrées et un Tiers-Monde encore marqué par les famines. Terrace souligne l’ironie cruelle d’un système où l’on se demande s’il ne faudrait pas écouler la surproduction vers les pays pauvres… tout en soulignant les blocages logistiques, politiques et diplomatiques qui rendent ce geste quasi impossible. Même le recyclage en alimentation animale ou industrielle est perçu comme une solution bancale, révélatrice d’un système sans vision.
Ce texte, comme souvent sous la plume de Terrace, ne se contente pas d’énoncer les chiffres. Il dépeint un mécanisme économique comme une machine kafkaïenne, où chaque rouage contribue à une absurdité collective. L’image du capitalisme occidental qui transpire pour gérer son trop-plein résonne comme une satire féroce de la technocratie bruxelloise.
En creux, l’article souligne aussi la fracture entre une agriculture productiviste, dopée par les subventions, et la réalité sociale et écologique. Les stocks de lait en poudre ne sont pas seulement un embarras financier : ils incarnent l’échec d’une Europe incapable de concilier prospérité agricole et justice alimentaire.
Avec cet article, Le Canard montre que derrière l’anecdote d’un stock de lait invendable se cache une critique plus large : celle d’un système qui a cessé de servir les hommes pour ne plus obéir qu’à ses propres automatismes.