N° 2863 du Canard Enchaîné – 10 Septembre 1975
N° 2863 du Canard Enchaîné – 10 Septembre 1975
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Justice-oubliettes
Les procès qui n’aboutissent jamais
Les procès à rallonge, ça vous dit ? Bernard Thomas nous en livre le catalogue grinçant dans Le Canard du 10 septembre 1975. De la fusillade de la Lufmada à la mort de Jean-Louis Portal, de l’affaire Markovic aux victimes de bistrot, tout y passe : procédures interminables, expertises à la chaîne, renvois multiples et une justice qui finit par enterrer les dossiers sous des montagnes de paperasse. Avec ironie, l’auteur montre comment le système judiciaire, censé dire le droit, excelle surtout dans l’art d’oublier. Quand la justice devient oubliettes, c’est le citoyen qui trinque.
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Justice-oubliettes
Procès sans fin, vérité en suspens
Bernard Thomas, dans ce papier au titre évocateur, braque son projecteur sur les lenteurs et les chausse-trappes d’une justice française engluée dans ses propres mécanismes. Les exemples défilent : le drame de la Lufmada, la mort inexpliquée de Jean-Louis Portal, les suites brumeuses de l’affaire Markovic. Autant de dossiers qui semblent se dissoudre dans l’attente, à mesure que s’accumulent les expertises et que s’égrènent les reports. L’article en souligne le paradoxe : les justiciables attendent réparation, mais le temps devient l’arme principale d’une institution qui finit par épuiser plaignants, témoins et parfois même accusés.
La satire fonctionne d’autant mieux que Thomas alterne registres. D’un côté, la gravité des faits : morts violentes, drames familiaux, escroqueries retentissantes. De l’autre, l’ironie mordante : ces « oubliettes » où s’entassent les affaires ressemblent moins à des tribunaux qu’à des labyrinthes conçus pour ne jamais déboucher sur une issue. L’auteur souligne la part d’absurde : la justice convoque, renvoie, re-convoque, au point que la vérité finit par disparaître derrière les formulaires et les délais.
En filigrane, Thomas pointe aussi une hiérarchie sociale de l’oubli. Les puissants ou leurs héritiers trouvent dans ces lenteurs une forme de protection ; les anonymes, eux, subissent l’érosion implacable d’un système où leurs plaintes perdent en visibilité. La métaphore des « oubliettes » est donc double : elle désigne l’ensevelissement bureaucratique des affaires, mais aussi la relégation des victimes au rang de figurants d’une pièce interminable.
En conclusion, le texte ne se contente pas de railler. Il interpelle : une justice qui s’enlise dans l’indécision ne fait pas qu’inquiéter, elle mine la confiance dans l’État de droit. Et derrière la drôlerie de la plume, c’est une critique sévère qui demeure : quand les procès deviennent un théâtre sans fin, ce sont les citoyens qui en paient le prix, condamnés à l’oubli avant même que le verdict ne tombe.