N° 2869 du Canard Enchaîné – 22 Octobre 1975
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Espagne : Des tueurs bien de chez nous
Octobre 1975 : alors que les derniers soubresauts du franquisme secouent l’Espagne, Le Canard enchaîné déterre une histoire embarrassante pour la France. Derrière les commandos « guérilleros du Christ-Roi » qui frappent à Madrid et ailleurs, on retrouve des filières bien françaises, recrutant dans les réseaux O.A.S. et pieds-noirs. Antoine Gourbeyre dresse un tableau grinçant de ces tueurs « bien de chez nous », recyclés dans des opérations troubles avec la bénédiction tacite de certaines autorités. Une enquête qui met à nu les zones grises de la diplomatie giscardienne et l’ombre persistante de nos guerres coloniales.
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Espagne : Des tueurs bien de chez nous
Des tueurs aux accents familiers
Sous le titre mordant « Des tueurs bien de chez nous », Antoine Gourbeyre démonte l’illusion d’une Espagne isolée dans ses violences politiques. Les commandos de l’ombre, censés défendre le franquisme finissant, ne sont pas seulement espagnols. Ils comptent dans leurs rangs des Français, pieds-noirs et anciens de l’O.A.S., recyclés comme mercenaires au service de causes douteuses. Le journaliste souligne à quel point ces personnages passent sans difficulté les frontières, trouvant soutien, complicités ou simple indifférence dans l’Hexagone.
Le pied de Marcel et les autres
Le portrait du mystérieux « Marcel », Français impliqué dans un attentat en juin 1975 à Biarritz, incarne parfaitement ce mélange de bricolage et de professionnalisation. Recruté par des intermédiaires espagnols, rémunéré à prix modeste, il illustre la continuité d’une filière de violence née en Algérie et jamais éteinte. Les pseudonymes changent, les terrains d’action aussi, mais le modus operandi reste identique : explosifs, commandos improvisés, atmosphère de complot permanent. Gourbeyre insiste sur cette filiation directe avec les vieilles structures de l’O.A.S., ranimées sous une autre bannière.
Le silence gênant des autorités
Le cœur de l’article réside dans l’attitude française. Alors que la DST identifie les allées et venues de ces guérilleros, les dossiers s’entassent dans les tiroirs. Les actions menées en Espagne sont « directement traitées par son cabinet », écrit le Canard, en visant sans détour Michel Poniatowski, ministre de l’Intérieur. Autrement dit, Paris ferme les yeux – ou pire, couvre tacitement ces opérations – pour ne pas froisser Madrid, au moment même où Giscard rêve d’une Europe intégrant l’Espagne post-franquiste.
Héritages encombrants
Ce reportage grinçant montre combien la France reste prisonnière de ses héritages coloniaux. Les anciens de l’O.A.S., mal digérés par la République, trouvent là un nouveau champ d’action. Ce qui aurait pu être une simple chronique d’espionnage devient, sous la plume de Gourbeyre, un miroir tendu à la diplomatie française : vouloir ménager Franco et ses successeurs, quitte à tolérer des tueurs français recyclés à Madrid. L’Espagne se prépare à entrer dans l’Europe, mais c’est avec des « enfants perdus » que Paris la courtise encore.