N° 454 du Canard Enchaîné – 11 Mars 1925
N° 454 du Canard Enchaîné – 11 Mars 1925
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Trop de demi-mesures
Le 11 mars 1925, Maurice Maréchal règle ses comptes avec Édouard Herriot dans un éditorial au vitriol intitulé « Trop de demi-mesures ». Le fondateur du Canard enchaîné y fustige le tempérament trop conciliant du président du Conseil, plus prompt à distribuer des poignées de main qu’à trancher dans le vif. Face aux scandales, à la vie chère et à la timidité des réformes, Maréchal raille une politique « à l’eau de rose ». Dans la France du Cartel des gauches, entre espoirs sociaux et désillusions rapides, le Canard rappelle qu’on ne réforme pas un pays avec des demi-mesures — ni avec un sourire.
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En une du Canard enchaîné du 11 mars 1925, Maurice Maréchal signe un éditorial cinglant intitulé « Trop de demi-mesures », où il s’en prend directement au président du Conseil Édouard Herriot, chef du gouvernement du Cartel des gauches. Sous des airs de billet d’humeur, ce texte sonne comme un réquisitoire contre la mollesse d’un pouvoir plus soucieux de plaire que d’agir.
« M. Herriot est fait pour être président du Conseil à peu près comme nous pour être pape », attaque Maréchal dès les premières lignes. La comparaison donne le ton : ce n’est pas l’homme qu’il condamne, mais sa nature. Herriot est décrit comme un « bon garçon », un modéré perpétuel, trop aimable pour gouverner. Dans la logique implacable du Canard, la politique demande de la poigne, pas de la poignée de main.
L’éditorial s’inscrit dans le contexte d’une France désillusionnée. Moins d’un an après sa victoire, le Cartel des gauches d’Herriot déçoit une opinion qui espérait un véritable changement social. L’inflation persiste, la fiscalité reste injuste, la question du pain — symbole par excellence du coût de la vie — revient à la une de tous les journaux. Maréchal s’en amuse : Herriot, dit-il, préfère « la demi-mesure » même dans la hausse du pain. Il critique un gouvernement qui ne parvient ni à apaiser les milieux populaires ni à inquiéter sérieusement les milieux d’affaires.
Au fil du texte, les exemples fusent : les scandales judiciaires, les amnisties partielles, les décorations distribuées avec parcimonie. Tout y passe, jusqu’à la Légion d’honneur, dont les promotions, limitées à « quelques dizaines », deviennent le symbole d’une tiédeur nationale. Le verbe de Maréchal glisse de la plaisanterie à l’amertume : la République, pense-t-il, risque de s’enliser dans l’hésitation et la peur de déplaire.
Ce qui transparaît dans cette chronique, c’est le désenchantement d’un satiriste qui avait accueilli la victoire du Cartel avec bienveillance. En 1924, Le Canard enchaîné avait soutenu, par son ironie bien placée, la chute du Bloc national et la défaite de Millerand. Mais moins d’un an plus tard, la gauche au pouvoir apparaît comme une réédition affadie de ses prédécesseurs. Herriot voulait concilier les forces sociales ; Maréchal y voit une faiblesse politique.
La verve du fondateur du Canard se fait ici prophétique :
« Le temps est passé des gestes timides et de la politique à l’eau de rose. Qu’il ose ! »
L’exhortation sonne comme un appel au courage civique, mais aussi comme une profession de foi satirique : mieux vaut un coup de bec franc qu’un consensus de circonstance.
À travers cet article, Maréchal cristallise une époque où la satire devient le miroir de la déception politique. Son Herriot à demi-mesure n’est pas seulement un portrait moqueur : c’est la métaphore d’une République hésitante, incapable de choisir entre réforme et prudence. En somme, pour Le Canard enchaîné de 1925, la demi-mesure n’est pas un compromis : c’est déjà une faute politique.





