N° 55 du Canard Enchaîné – 18 Juillet 1917
N° 55 du Canard Enchaîné – 18 Juillet 1917
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CONTES D’APRÈS LA GUERRE : La mort du commandant
Le 18 juillet 1917, Le Canard enchaîné publie un conte grinçant de Paul Vaillant-Couturier : La mort du commandant. Derrière la chronique d’une fin grotesque – un notable avalant sa pipe en apprenant la paix – se dessine une satire impitoyable de la France de l’arrière, engoncée dans ses petites manies, ses formules toutes faites et ses emballements collectifs.
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Avec La mort du commandant, Paul Vaillant-Couturier livre au Canard enchaîné un récit où la dérision se mêle au tragique. Le décor : Noilly-le-Sec, petite ville fictive qui pourrait être n’importe quelle bourgade française de l’arrière en 1917. La nouvelle de la fin de la guerre y tombe comme un pavé dans la mare : chacun réagit selon son rôle convenu. Le pharmacien répète son éternel « Nous sommes trahis », l’adjoint son sempiternel « Nous sommes vainqueurs », le proviseur évoque gravement « un tournant de l’histoire ».
C’est toute une galerie de clichés que Vaillant-Couturier croque à coups de plume sèche. Le notaire songe déjà à mettre son argent à l’abri en Espagne ; la patronne de café se projette dans les larmes du retour ; le commandant, quant à lui, s’étrangle littéralement dans sa moustache et sa pipe, emporté par une émotion mal digérée. Une mort absurde, qui devient aussitôt matière à interprétation : espionnage boche pour les uns, occasion de discours enflammés pour d’autres, et surtout prétexte à éviter tout remous diplomatique.
La force du texte réside dans ce décalage permanent : au lieu d’héroïser les acteurs, Vaillant-Couturier les réduit à des caricatures obsédées par leurs petites phrases et leurs réflexes pavloviens. Même la mort, grotesque et triviale, ne suscite que des emballements collectifs vite dissipés. On enterre à la hâte le commandant – l’été est chaud et « l’alcool ne conserve pas » – et sa femme suit le cortège avec deux enfants improbables, l’un « Malabar » et l’autre « nègre », ultime touche d’absurde qui achève de transformer la tragédie en farce.
Dans le contexte de 1917, ce type de conte illustre bien la ligne du Canard : démystifier l’héroïsme de façade, pointer les ridicules de l’arrière, et rappeler, par l’ironie, que la guerre ne produit pas seulement des drames sanglants mais aussi des absurdités révélatrices.