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N° 833 du Canard Enchaîné – 15 Juin 1932

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Les députés apprennent leur métier

15 juin 1932 : la Chambre s’ajourne après deux jours de travail, et Le Canard enchaîné s’en donne à cœur joie. Dans « Les députés apprennent leur métier », André Dahl décrit le Palais-Bourbon transformé en caserne où les élus s’entraînent à voter, parler et s’indigner sans danger. Une leçon de démocratie par l’absurde, où le parlementarisme devient une gymnastique du vide.

La télévisiophonie, dessin de Pruvost.

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15 juin 1932 : André Dahl transforme la Chambre en caserne – les députés, ces élèves du peloton parlementaire

Dans son édition du 15 juin 1932, Le Canard enchaîné livre une des plus savoureuses satires de la Troisième République finissante. Sous le titre « Les députés apprennent leur métier », André Dahl imagine les nouveaux élus du Palais-Bourbon en apprentis-soldats d’une « école du Parlement », où l’on répète les gestes et les cris de la démocratie comme à l’exercice. Deux jours à peine après avoir voté la confiance à Édouard Herriot, la Chambre s’est ajournée « jusqu’au 21 juin ». Le gouvernement à peine formé part en congé — et Le Canard en profite pour tourner en ridicule cette République d’habitudes, de formules et de discipline de parade.

L’article s’ouvre sur une formule assassine : « Voilà une législature qui commence bien ! Deux jours de travail et quinze jours de vacances ! » Dahl plante aussitôt le décor d’un Palais-Bourbon vidé de tout sérieux, où les députés s’entraînent comme de jeunes conscrits à manier les instruments de la rhétorique parlementaire. Les uns apprennent à voter sans se salir les mains — « on leur indique comment il doit voter, les bulletins étant simulés par de vieux boutons » —, d’autres à hausser la voix au bon moment : « Je demande la parole ! — Je renonce à la parole ! ». L’ironie est mordante : ces élus censés incarner la souveraineté nationale sont décrits comme des pantins à qui l’on enseigne les réflexes de la démocratie comme on dresse des soldats à saluer.

Tout l’article repose sur une métaphore filée : la Chambre des députés devient une caserne, le président un sergent-instructeur, les séances des manœuvres. Dahl décrit avec un faux sérieux les cours organisés pendant cette « formation parlementaire » : « À genoux ! Couchez-vous ! », « Nous avons un cours sur l’héritage et la décoration », « un exercice de panique financière organisé par Paul Reynaud ». L’humour est d’autant plus efficace qu’il transpose fidèlement la réalité bureaucratique du régime : un parlement où l’on s’exerce davantage à la posture qu’à la décision, où les « anciens » initient les « bleus » aux ficelles de la comédie politique.

Dahl s’amuse aussi à croquer les figures typiques du Palais-Bourbon. On y retrouve M. Bouisson, président de la Chambre, qui s’étonne qu’un député puisse « faire quelque chose » : « Mais enfin, nous sommes à la Chambre ! » — un trait de pur génie satirique, où l’absurde résume la vérité : l’Assemblée n’agit pas, elle parle. Plus loin, les jeunes élus s’exercent au « maniement de l’héritage et de la décoration », ou se font initier par Paul-Boncour à la technique du discours sans contenu. Georges Mandel, figure du jeune loup républicain, fait une apparition en instructeur de l’ambition, tandis que André Tardieu, ancien président du Conseil déchu, est mentionné en modèle de l’art de « la manœuvre élégante ».

Cette galerie grotesque a valeur de radiographie politique. Nous sommes en juin 1932 : la Chambre issue des élections d’avril et mai vient de se constituer. La majorité radicale-socialiste d’Herriot, soutenue de loin par les socialistes, s’installe dans un climat d’inertie et de lassitude. Les finances sont au plus bas, le franc vacille, le pays doute. Mais au Palais-Bourbon, rien ne semble plus urgent que de former les nouveaux venus à la rhétorique du « bon député » : celui qui parle sans agir, vote sans lire, s’indigne sans conviction. Dahl transforme cette mécanique en pantomime burlesque. Les ordres de la hiérarchie se confondent avec les slogans politiques : « Alliez-vous à vos électeurs ! », « Renoncez à la parole ! », « Je vous donne rendez-vous dans quatre ans ! ».

Le dessin de Guilac, à gauche du texte, parachève la caricature : un petit maître d’école, minuscule et moustachu, sermonne un rang d’hommes cravatés et ahuris, étiquetés « députés ». La scène a des airs de parade militaire mêlée à un cours du soir pour bourgeois maladroits. On y lit la conviction du Canard : la Troisième République a transformé la démocratie en profession – un métier comme un autre, avec ses leçons, ses examens et ses tricheries.

Derrière le rire perce une lassitude plus grave. Dahl n’attaque pas seulement les hommes, mais le système qu’ils incarnent. Le radicalisme au pouvoir, censé incarner le progrès et la laïcité, s’est figé dans une routine parlementaire vidée de sens. Les scandales (Chiappe, Gorguloff, les banques), la crise économique mondiale, les luttes de clans minent la confiance publique. En observateur lucide, Le Canard devine déjà la dérive d’un régime sans ressort. Quatre ans plus tard, la Chambre de 1932 sera balayée par les crises de 1936 et 1938.

Mais en 1932, la presse satirique garde encore la force du rire. Dans cette chronique, André Dahl fait du Palais-Bourbon un cirque républicain : entre l’école du peloton et la classe de théâtre, la France parlementaire y apprend surtout à ne rien faire — avec méthode.