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N° 863 du Canard Enchaîné – 11 Janvier 1933

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Pierre Scize

11 janvier 1933 : coup de tonnerre au Canard enchaîné. Pierre Scize, plume redoutée et chroniqueur vedette, est renvoyé par Maurice Maréchal pour avoir accepté la Légion d’honneur. Un ruban rouge contre un principe d’or : l’indépendance absolue du Canard. Dans une lettre publique, Maréchal tranche avec calme et fermeté. Ce jour-là, la satire devient morale — et la liberté, une ligne de conduite.

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11 janvier 1933 : Le Canard enchaîné se coupe une aile — l’affaire Pierre Scize, ou l’honneur selon Maréchal

Dans l’édition du 11 janvier 1933, Le Canard enchaîné vit une crise sans précédent : la rupture entre son directeur-fondateur Maurice Maréchal et l’un de ses plumes les plus redoutables, Pierre Scize. En cause, une croix : la Légion d’honneur que Scize a acceptée le 29 décembre 1932, à titre militaire, en raison de sa mutilation pendant la Grande Guerre. Un ruban rouge, mais une tache indélébile au regard de la règle absolue du Canard : ses rédacteurs, par principe, refusent toute décoration, toute reconnaissance officielle, fût-elle honorifique.

Maréchal l’avait posé dès les débuts du journal : l’indépendance du Canard est incompatible avec les rubans, médailles et décorations. Être du Canard, c’est se tenir à distance de l’État, de ses hochets, de ses flatteries. En acceptant la distinction, Scize rompt le pacte moral. Et la réponse de Maréchal, à la une du 11 janvier, est d’une rigueur glaciale, presque douloureuse : il publie la lettre de son collaborateur — et la démonte ligne à ligne, dans un texte où l’amitié cède la place au principe.

« Je l’ai acceptée… et je n’en ai pas honte »

La lettre de Pierre Scize, datée du 5 janvier, mêle fierté blessée et justification : il dit avoir accepté la Légion « moitié par orgueil, moitié par humilité », par respect pour les mutilés et par reconnaissance des camarades tombés. Il s’étonne du « silence » du Canard, qu’il interprète comme un rejet. Et il revendique son geste : « Je l’ai acceptée, sachant ce que je faisais. Je n’en ai pas honte. »

Mais pour Maréchal, le mal est fait. Ce n’est pas la médaille qui choque — c’est la symbolique. En arborant le ruban rouge, Scize rompt le tabou fondateur du journal : ne jamais pactiser, même symboliquement, avec le pouvoir. Le directeur du Canard relève aussitôt la contradiction : Scize prétend « n’attacher aucune importance à ce petit bout de machin rouge » tout en disant en être fier. La médaille devient alors le signe d’une confusion : un homme de plume, critique impitoyable du nationalisme, du militarisme et du conformisme bourgeois, se laisse séduire par l’un de leurs emblèmes les plus sacrés.

La morale du Canard : pas de ruban pour l’esprit libre

La réponse de Maréchal, d’une sobriété tranchante, n’a rien d’un règlement de compte personnel. C’est une leçon d’éthique journalistique, au sens le plus exigeant du terme. Il rappelle d’abord le contexte : l’équipe du Canard, en découvrant la décoration de Scize dans Le Petit Parisien, a d’abord cru à une erreur. Puis, devant la confirmation, le silence s’est imposé. « Ce n’est pas moi qui ai été décoré », écrit Maréchal, refusant de se justifier autrement que par la ligne du journal.

Sa décision de publier la lettre de Scize n’est pas un règlement de compte, mais un acte public de cohérence : il s’agit de montrer que le Canard applique ses principes, même à ses amis. « Nous n’avons pas agi en ennemis, mais en amis d’un collaborateur de sept années. » Le ton, froid, n’est pas cruel : il est moralement implacable. Le journal qui vit de l’ironie et de la dérision prouve, ce jour-là, qu’il sait aussi se dresser en conscience.

Maréchal ne s’arrête pas à la justification de Scize — il la démonte. Si la croix n’a « pas d’importance », pourquoi la porter ? Si elle n’est qu’un hommage aux mutilés, pourquoi ne pas la refuser, comme tant d’autres qui partagent la même blessure ? À la logique du cœur, Maréchal oppose la rigueur du principe : le Canard n’est pas un journal comme les autres, et l’irrévérence se doit d’être totale, même envers les institutions les plus “honorables”.

“Le Flaougnard de la semaine” : quand le Canard juge les siens

En page 3, l’affaire se prolonge avec la publication du Flaougnard de la semaine, signé « Hellé », collaborateur du Travail de Verviers. Le texte, d’une ironie brutale, entérine la condamnation morale de Scize. « Pierre Scize, le contempteur du militarisme, le fouilleur de poubelles de conscience, qui chicane quand il en retire un ruban rouge… quelle bonne blague ! » La plume est acérée, presque cruelle : Scize, « trublion caustique », est accusé de s’être “platement dégonflé”, de passer du côté des “amis de Chéron”, c’est-à-dire du conformisme bourgeois.

Le Flaougnard — sorte de tribunal hebdomadaire de la bêtise — n’épargne donc pas un des siens. C’est une excommunication par le rire. L’ironie du Canard, d’ordinaire tournée vers les politiciens ou les puissants, se retourne contre l’un de ses piliers. Et en cela, cette séquence marque un tournant : le journal satirique, qui revendique depuis 1916 sa liberté de ton, prouve qu’il s’impose à lui-même la même discipline morale qu’aux autres.

Une rupture fondatrice

L’affaire dépasse la querelle interne. En 1933, la presse française vit encore dans une dépendance structurelle vis-à-vis du pouvoir politique, de la publicité et des honneurs. Refuser la Légion d’honneur, c’est refuser d’être “tenu”. Dans ce contexte, la fermeté de Maréchal fait figure de manifeste. La décision de se séparer de Pierre Scize, pourtant l’un des plus brillants chroniqueurs du journal, affirme une conception rare de la presse : ni soumise, ni décorée.

Scize, pour sa part, reste un écrivain remarquable — pamphlétaire, caustique, lyrique — mais désormais privé du socle qui lui donnait sa liberté. L’histoire retiendra sa disgrâce comme une blessure morale : un homme de talent, rattrapé par ce qu’il dénonçait. Et l’histoire du Canard retiendra, surtout, qu’il a su sacrifier un nom pour préserver son esprit.

Une leçon d’intégrité journalistique

Ce 11 janvier 1933, Le Canard enchaîné prouve qu’il n’est pas seulement un journal satirique : c’est une institution éthique. Là où d’autres auraient dissimulé le conflit, Maréchal l’expose, le documente, l’explique. Sa loyauté n’est pas envers un homme, mais envers une idée : celle d’une presse libre de tout ruban, de tout pouvoir, de tout remerciement.

Dans une époque où tant de journalistes courent les décorations, cette “affaire Scize” résonne comme un serment : mieux vaut perdre un ami que perdre son âme.