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N° 911 du Canard Enchaîné – 13 Décembre 1933

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Enfin le lampiste va payer

Le 13 décembre 1933, R. Tréno signe dans Le Canard enchaîné un billet au vitriol : « Enfin le lampiste va payer ».
Sous l’humour, une indignation profonde : pendant qu’on prélève 2 % sur les salaires des fonctionnaires, les rentiers s’enrichissent et la Bourse grimpe.
Tréno dresse le portrait d’une France cynique où les petits paient pour rassurer les gros.
Quelques semaines avant l’affaire Stavisky, Le Canard dévoile déjà la mécanique d’un régime à bout de souffle : le lampiste paie toujours — et les coupables trinquent au champagne.

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« Enfin le lampiste va payer » : Tréno démasque la comédie de la justice sociale

En décembre 1933, la Troisième République s’enfonce dans la crise économique et morale. Le gouvernement Chautemps vient d’obtenir le vote d’un prélèvement sur les traitements des fonctionnaires — une mesure dite de “redressement” budgétaire censée combler le déficit de l’État.
Dans un climat de lassitude et de méfiance, Le Canard enchaîné met le doigt sur l’hypocrisie de la décision. Sous la plume acérée de R. Tréno, l’affaire devient une parabole de la France injuste : celle où le lampiste paie toujours pour les autres.


Le titre : tout est dit

« Enfin le lampiste va payer » : quatre mots qui condensent le sarcasme du Canard.
Le “lampiste”, c’est le petit fonctionnaire, le salarié, celui qu’on taxe quand les caisses sont vides. Figure familière du vocabulaire populaire, il incarne le bouc émissaire ordinaire d’un système où les puissants se débrouillent toujours pour passer entre les gouttes.

Dès l’incipit, Tréno déroule la scène :

“Samedi, la Chambre votait le prélèvement sur les traitements des fonctionnaires et obtenait ainsi les 275 millions fatidiques qui doivent combler un déficit de six milliards.”

La disproportion est saisissante : quelques centaines de millions arrachés aux employés pour “combler” un gouffre de six milliards. Tréno souligne l’absurdité du sacrifice et, plus encore, la satisfaction morale avec laquelle on l’impose.


L’économie politique du cynisme

La mécanique dénoncée par le Canard est implacable : on allège les finances publiques en pressurant les plus modestes, et cette rigueur est saluée comme une victoire morale.

“Ainsi le lampiste, dont les émoluments seront amputés de 2 %, aura du moins la consolation de se dire que son sacrifice n’aura pas été vain.”

Tréno n’a pas besoin d’ajouter un mot : l’ironie suffit. La “consolation” du lampiste, c’est de savoir qu’en payant, il rassure les rentiers. Car la bourse, elle, se porte mieux :

“Les rentes françaises ont monté aussitôt.”

Les marchés se réjouissent, le petit peuple s’appauvrit — tout va bien, la “confiance” est revenue. L’auteur enfonce le clou :

“Et l’on dira après ça que la confiance n’est pas une belle chose !”

C’est tout le cynisme d’une époque où le mot “confiance” — synonyme de stabilité financière — remplace celui de justice sociale.


Le lampiste et le gros rentier

Le contraste est au cœur de l’article. D’un côté, le lampiste, petit employé consciencieux, qui “paie bien”, même s’il ne gagne presque rien. De l’autre, le gros rentier, caricature du bourgeois satisfait, “plus riche du jour au lendemain” grâce à la hausse des valeurs de rente.
Tréno met en scène ce duo avec une ironie féroce :

“Son voisin, le gros rentier, s’en trouve plus riche du jour au lendemain, puisque, sans bouger seulement le petit doigt, les titres qu’il avait en portefeuille acquièrent une plus-value appréciable.”

La satire vise juste. Dans la France de 1933, la rente est le symbole d’un capitalisme d’inertie, hérité du XIXe siècle, qui profite du travail et du sacrifice des autres.

Mais le rentier, précise Tréno, ne demandait pas l’impossible. Ce n’est pas l’argent qui l’intéressait, mais le “principe” :

“Pendant que l’on songeait à retenir ces deux pour cent, on ne pensait pas à ennuyer le brave gros rentier.”

Autrement dit, il fallait bien une diversion. En concentrant le débat public sur la contribution des petits, le gouvernement épargnait les puissants.


La diversion politique

La suite de l’article est une leçon de rhétorique satirique. Tréno énumère tout ce à quoi on ne pense plus une fois le lampiste sacrifié :

“On ne pensait plus au précompte.
On ne pensait plus aux comptes joints.
On ne pensait plus à l’affichage dans les mairies des noms des contribuables qui payent.”

La répétition fait mouche : le refrain devient un instrument de dénonciation. On ne pense plus aux fraudes, aux évasions fiscales, ni aux fortunes amassées par les banques suisses.
Tout est centré sur le fonctionnaire, ce “malfaiteur” commode qu’on peut faire payer sans risque.

“Toute l’attention était portée sur le seul lampiste, ce galeux qui, par son intransigeance, se permettait de renverser les ministères ; ce malotru qui, pour une somme insignifiante, paralysait la vie politique et économique de ce pays.”

La phrase est un chef-d’œuvre d’ironie : Tréno reprend le ton même des éditorialistes réactionnaires qui accusaient les petits salariés d’être les saboteurs de l’économie.


Le vrai coupable

Le texte s’achève sur une fausse victoire :

“Enfin, on l’a tout de même eu, ce lampiste. Cette fois, on ne le lâchera pas.”

La dernière phrase, en forme de triomphe, sonne comme un verdict. Le système a retrouvé son équilibre : le lampiste est puni, les rentiers peuvent dormir tranquilles, et la République a son bouc émissaire.

Sous le rire, la colère gronde. En décembre 1933, la France vit ses derniers mois avant l’onde de choc de Stavisky, qui éclatera en janvier 1934. L’affaire révélera au grand jour ce que Tréno annonçait ici : l’impunité des puissants et la culpabilisation des petits.
Ce billet, apparemment léger, préfigure la tempête : il dit la fracture morale d’un pays où la justice sociale n’est plus qu’un mot creux.