Roger Salardenne (1902-1968)
Journaliste, écrivain et humoriste, Roger Ferdinand Alexis Salardenne naît le 3 mars 1902 à Sedan (Ardennes). Il s’impose dès les années 1920 comme l’une des figures singulières de l’humour français, mêlant fantaisie loufoque, érudition décalée et regard bienveillant sur le monde. Il meurt à Paris (XXᵉ arrondissement) le 8 mai 1968, au terme d’une longue maladie.
Des débuts précoces dans la presse
Entré très tôt dans le journalisme, Roger Salardenne publie ses premiers textes au début des années 1920. Il collabore à divers journaux et maisons d’édition populaires, où il signe romans, chroniques et « gauloiseries », parfois d’inspiration érotique, dans un esprit volontiers parodique. Il écrit notamment pour les éditions Rouff et Ferenczi & fils, et cosigne avec l’humoriste René Virard La Vénus des sleepings (1927).
Curieux de tout, il est aussi l’auteur de plusieurs ouvrages très documentés consacrés au naturisme en Allemagne à l’époque de la République de Weimar (1929-1931), travaux aujourd’hui peu connus mais révélateurs d’un esprit attentif aux marges, aux utopies sociales et aux contre-cultures européennes.
Le Fakir du Canard enchaîné
Roger Salardenne entre au Canard enchaîné dès septembre 1923. À partir de 1925, il y tient régulièrement chronique sous le pseudonyme savoureusement orientaliste de « Fakir Denn’salhar », dans la rubrique « Le coin du fakir ». Pendant des décennies, il y commente l’actualité avec une bonne humeur imperturbable, un humour « délicieusement loufoque », selon les mots mêmes du journal.
Son style, faussement nonchalant, repose sur l’absurde, le décalage et une ironie sans méchanceté. Loin de l’attaque frontale, Salardenne préfère la pirouette, l’ellipse et le sourire en coin. Cette voix singulière s’épanouit aussi bien dans les colonnes du Canard que dans celles de L’Os à moelle, hebdomadaire satirique fondé par Pierre Dac, qu’il anime à ses côtés.
Reportages, romans et fidélités
Outre ses chroniques humoristiques, Roger Salardenne signe des grands reportages, notamment dans Le Parisien libéré, ainsi que des romans « farfelus », selon l’expression affectueuse du Canard. Il demeure toutefois profondément attaché à une forme d’humour populaire et accessible, sans jamais céder au cynisme.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il participe au journal humoristique lyonnais Guignol, en compagnie d’Ernest Reynaud. Après la Libération, il retrouve naturellement la rédaction du Canard enchaîné, où il poursuit sa collaboration jusqu’à ce que la maladie l’oblige à se retirer progressivement de l’écriture.
Un homme à part
Dans le bref hommage que lui rend le Canard enchaîné du 15 mai 1968, le journal souligne que, malgré les années de silence imposées par la maladie, Roger Salardenne avait conservé intact « son humour imperturbable ». Ceux qui l’ont connu gardent le souvenir d’« un ami affable et doux », semblant traverser la vie « hors de portée des méchancetés ».
Toute l’équipe du Canard s’associe alors à la peine de sa femme et de sa fille, saluant la mémoire d’un compagnon de route fidèle, discret et profondément humain.
Fumet de Canard : Fakir sans tapis volant mais jamais à court de pirouettes, Roger Salardenne aura fait du rire une forme de politesse, et de la loufoquerie un art sérieux. Une plume douce, obstinément libre, qui savait regarder le monde de biais pour mieux en révéler l’absurdité.








