N° 117 du Canard Enchaîné – 25 Septembre 1918
N° 117 du Canard Enchaîné – 25 Septembre 1918
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🖋️ OUI OU NON ? par Henri Béraud – Le 25 septembre 1918, Henri Béraud s’empare de la mort d’Abel Ferry pour dénoncer une hypocrisie insupportable. Une semaine plus tôt, le député était voué au pilori par Maurras et Daudet, accusé de « défaitisme ». Mort au champ d’honneur, il est aussitôt récupéré par ses détracteurs. Dans Le Canard enchaîné, Béraud démonte cette volte-face et interroge : peut-on tolérer que des polémistes insultent les vivants avant de pleurer les morts ? Une leçon de journalisme satirique qui garde toute sa vigueur.
🖋️ Enfin ! La fin ! – Sous ce cri de soulagement, le Canard raille l’annonce ministérielle du retour des « classes » en octobre. Le journal choisit d’y voir les « classes militaires », concluant que la guerre est finie. Satire jubilatoire où la paix devient enfin croyable… par un jeu de mots.
« Concours d’échos pour L’Intran » – Le concours continue, et le ton s’affine : dans ce numéro de septembre, le Canard publie des anecdotes envoyées par ses lecteurs qui tournent toujours plus en dérision le pathos de L’Intransigeant. Les larmes deviennent mécaniques, ridiculement prévisibles, révélant la pauvreté d’un imaginaire journalistique que la satire pulvérise.
L’exemple vient d’en haut, dessin d’André Foy – Encore, dessin de Jif –
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L’article « Oui ou non ? », signé Henri Béraud en une du Canard enchaîné du 25 septembre 1918, illustre l’art consommé du pamphlet. Béraud y part d’un fait précis : la mort au front du député Abel Ferry, tombé héroïquement. Mais loin d’un simple hommage, il en fait une arme contre ceux qu’il nomme, avec un mépris jubilatoire, les « crocodiles jumeaux de la ménagerie royale » : Charles Maurras et Léon Daudet.
Quelques jours avant la mort de Ferry, les deux figures de l’Action française l’avaient accablé de leurs attaques les plus perfides. Ils réclamaient son passage en conseil de guerre, allant jusqu’à suggérer pour lui le poteau de Vincennes, accusation suprême de « défaitisme » qui frappait alors nombre de voix discordantes. Et voici qu’à peine Ferry tombé, les mêmes se répandent en regrets, soulignant leur « sincère douleur ».
C’est cette volte-face que Béraud dénonce, en la présentant comme une farce obscène. Son texte n’est pas seulement un réquisitoire contre deux polémistes, mais une interrogation plus large : jusqu’où peut-on tolérer que des hommes salissent les vivants pour mieux glorifier les morts ? La question posée dans le titre, « Oui ou non ? », résonne comme une mise en demeure adressée au public : faudra-t-il continuer de laisser impunis ces jeux macabres de l’Action française ?
La force de Béraud tient à son mélange d’indignation et d’ironie populaire. Il oppose les insultes de Daudet, ce « poilu de l’arrière » à la plume trempée dans la bile, au sacrifice réel d’Abel Ferry, qui, lui, paya de sa vie son engagement. Et il retourne l’accusation de défaitisme contre les véritables fauteurs de désordre moral : ceux qui, par leurs outrances, minent la cohésion nationale.
Enfin, l’article s’élargit à une réflexion politique : si la République tolère de tels excès, c’est sa propre dignité qu’elle compromet. Béraud appelle à « mettre une sourdine à leur bastringue », autrement dit, à réduire au silence ces voix qui insultent avant de pleurer.
Un siècle plus tard, ce texte garde toute sa vigueur : il rappelle que l’indécence n’est pas seulement affaire de morale, mais aussi de responsabilité publique. À l’heure où l’opinion se forge au rythme des polémiques, la leçon de Béraud résonne encore : il ne suffit pas de pleurer les morts, il faut respecter les vivants.





