N° 2838 du Canard Enchaîné – 19 Mars 1975
N° 2838 du Canard Enchaîné – 19 Mars 1975
24,00 €
En stock
Des tonneaux de Carcassonne aux yachts d’Onassis : deux visages d’un même capitalisme
Dans son enquête sur les fraudes viticoles, Michel Gaillard dévoile les dessous d’un commerce du vin où fausses factures et arrangements fiscaux éclaboussent Bordeaux. Quelques pages plus loin, Bernard Thomas dresse le portrait sans concession d’Aristote Onassis, « chien des mers », milliardaire cynique dont l’empire maritime s’est bâti sur la guerre et la fraude. Deux mondes en apparence éloignés, mais que rapproche une même logique : celle d’un capitalisme sans scrupules, qui transforme le terroir en affaire douteuse et la mer en terrain de rapine. Dans les tonneaux comme sur les yachts, l’argent coule plus vite que l’honneur.
Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix
En stock
Le Canard du 19 mars 1975 offre une double leçon d’économie politique en dévoilant deux affaires a priori sans rapport : les fraudes sur le vin à Carcassonne et le portrait au vitriol d’Aristote Onassis. Michel Gaillard et Bernard Thomas, chacun à leur manière, pointent pourtant le même phénomène : la manière dont la fortune se nourrit de la fraude, de l’opacité et du cynisme.
Gaillard, dans son enquête sur les « vins de Carcassonne », détaille le système mis en place par Henri Pratz, négociant impliqué dans de vastes fraudes à la TVA. Factures fictives, exportations bidon, complicité plus ou moins tacite de notables bordelais : derrière l’image d’un terroir noble et authentique, on découvre la banalité d’un mécanisme d’escroquerie, où l’étiquette prestigieuse masque les turpitudes fiscales. La convivialité du vin, boisson populaire par excellence, se trouve pervertie par les manœuvres d’intermédiaires soucieux de spéculation plus que de tradition.
Thomas, lui, élargit la focale en dressant un portrait d’Aristote Onassis. Ici, pas de fraude locale mais une logique globale : naufrages profitables, pavillons de complaisance, pots-de-vin aux ministres, fortunes bâties sur le malheur d’autrui. Le « chien des mers » illustre ce capitalisme international qui prospère sur l’absence de règles et l’exploitation cynique des hommes. Onassis accumule yachts, villas, stars et épouses prestigieuses, quand ses marins meurent sur des « vaisseaux fantômes » dépourvus de sécurité.
Mis en parallèle, ces deux récits dessinent un tableau cohérent : qu’il s’agisse du vin ou de la mer, du vignoble de Carcassonne ou du casino de Monte-Carlo, la logique est la même. D’un côté, des intermédiaires trafiquent factures et millésimes ; de l’autre, un magnat trafique pavillons et assurances. Dans les deux cas, c’est la réputation – du vin français ou du prestige grec – qui sert de paravent à des pratiques douteuses.
En rapprochant ces deux affaires, le Canard montre que la fraude n’est pas un accident, mais bien une mécanique structurelle de ce capitalisme des années 1970. Derrière les barriques et les yachts, une même certitude : tant qu’il y aura des profits à engranger, peu importe si le vin est frelaté ou si les navires coulent, l’argent, lui, flotte toujours.