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N° 641 du Canard Enchaîné – 10 Octobre 1928

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79,00 

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Quand le Salon de l’Auto devient un temple : le Canard à plein régime
Bernard Gervaise, “Après M. Doumergue, le Canard a visité le Salon de l’Automobile”, Le Canard enchaîné, 10 octobre 1928



Octobre 1928 : le président Doumergue inaugure le 22ᵉ Salon de l’Automobile au Grand Palais. Le lendemain, Le Canard enchaîné s’y rend à son tour… et c’est tout un évangile mécanique qui passe à la moulinette. Sous la plume de Bernard Gervaise et les dessins moqueurs de Guilac, les voitures deviennent des idoles, les cylindres des dogmes, et les visiteurs — journalistes, ministres ou badauds — de pieux fidèles. Un article au carburant satirique, lancé plein gaz contre le culte du progrès et de la frime technologique.

Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix

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Canard au naturel
Canard en chemise

Chaque numéro ou journal anniversaire, peut être inséré dans une pochette cadeau au choix, d’un très beau papier pur coton, comportant une illustration originale spécialement réalisée pour COUAC ! par Fabrice Erre ou Laurent Lolmede, ou pour les premiers lecteurs du Canard Enchainé par Lucien Laforge.

Cette pochette cadeau assure aussi une conservation optimale du journal : un papier au PH neutre limitant la dégradation des vieux journaux sur la durée.

Décliné en 4 pochettes originales (Gratuite)
Pochette offerte pour toutes éditions d’un prix supérieur à 59€
Visualiser les illustrations en cliquant sur le nom des auteurs

Canard laqué

Enchâssé entre deux feuilles d’acrylique (plexiglass extrudé*) il s’exposera aux regards sous son plus beau jour.

Les propriétés anti-UV de ce plexiglass de 2 mm lui assureront une conservation optimale limitant le jaunissement.

Le maintien entre les deux plaques, avec 8 petites pinces nickelées, supprime la vue des plis ainsi que leurs effets indésirables. Les marges autour du journal sont de 2 cm et sont ajustées au format de l’édition, qui a varié au fil des décennies.

*Transparence, légèreté, résistance aux chocs et aux UV

Cette présentation est déclinée en 2 options :

Plexi transparent (30€) servant de fond, plus discret mais élégant il permet aussi la vision de la dernière page du journal.
Plexi noir (35€) servant de fond, il met en valeur la teinte et le format du journal, s’harmonisant parfaitement avec les encres noires de la page.

Au cœur de cet automne 1928, la France se grise de modernité. La radio se popularise, les avions fascinent, et l’automobile — encore symbole de richesse — attire au Grand Palais une foule médusée. Le Salon de l’Automobile est devenu le grand rituel de la République mécanique. Et pour Le Canard enchaîné, il n’en fallait pas plus pour en faire un culte païen — un “Temple de la Locomotion” béni par “Mgr Gaston Doumergue, évêque in partibus de l’Élysée”.

Dès la première phrase, Bernard Gervaise annonce la couleur : il emprunte le ton des chroniqueurs techniques pour mieux en déployer les absurdités. Le Grand Palais devient un sanctuaire, les voitures des reliques, les visiteurs des pénitents, et le président Doumergue, venu inaugurer le Salon, est transformé en prêtre laïque d’une religion du moteur. “Ces petites alvéoles pressées autour de la nef principale appellent des stands”, écrit Gervaise avec un humour liturgique ; “on n’a pas placé de bénitier à l’entrée, dommage : chaque fidèle eût trempé son doigt et se serait signé d’un geste pieux.”

Tout le texte joue sur ce double registre : le langage de la foi et celui du commerce technique. Les “Saints puissants” du Salon ne sont autres que les grands constructeurs : André Citroën, Hispano-Suiza, Renault, Peugeot, ou “Chose et Machin”. Les stands deviennent des chapelles où les cylindres remplacent les cierges. Le journaliste feint d’admirer l’organisation, tout en démontant la logique absurde du progrès automobile : “Six roues, six kilomètres à l’heure, six francs… Six cylindres !” L’obsession du chiffre magique devient le symbole d’une modernité qui tourne en rond.

Sous cette ironie, Le Canard épingle deux travers bien français de l’entre-deux-guerres : le fétichisme du progrès technique et l’enflure publicitaire. À une époque où la production automobile (notamment chez Renault et Citroën) explose, la presse célèbre chaque modèle comme un miracle industriel. Gervaise s’amuse à reprendre ce ton commercial : on y parle de “voitures qui se rallument toutes seules”, de “mécanismes démontables jusqu’au vilebrequin”, de “prix exprimés en billets de cent”. L’humour naît de la mécanisation du langage lui-même, envahi par les slogans, les sigles et les anglicismes — “HP”, “CV”, “tourisme”, “baby”, “six roues”…

Mais la satire ne s’arrête pas à la technique : elle vise aussi les attitudes sociales. Le Salon est un miroir de la hiérarchie des classes. Le Canard observe, pince-sans-rire, “les acheteurs qui ne savent pas conduire” et “les vendeurs qui ne savent pas mentir autrement qu’en chiffres”. L’entrée coûte dix francs — “une somme modique qui confère le droit de critiquer, de marchander et de se ruiner d’envie”. Derrière le gag, le constat est clair : l’automobile reste un luxe, mais on commence à la vendre comme un rêve accessible — illusion d’une France motorisée, avant même que la route soit prête à la recevoir.

Les dessins de Guilac prolongent cette charge visuelle : le caricaturiste montre un visiteur béat devant une “6 cylindres”, un autre discutant du prix d’un “faux cabriolet”. Chaque vignette souligne la foi naïve du public face à la machine, et le comique du progrès pris au pied de la lettre.

La conclusion est savoureuse : Gervaise, feignant l’indignation, regrette que le Salon soit “incomplet”. On y trouve des moteurs, des pneus, des carrosseries, mais pas de “stand Bornio” (le célèbre cirage), ni de “nouveau modèle d’agent verbalisateur encaissant sur place”. La satire du progrès se double ainsi d’une moquerie contre la prolifération réglementaire — autre culte républicain.

En 1928, la France s’enivre de vitesse, de cylindrée et d’ordre. Le Canard, lui, appuie sur le frein avec un sourire : dans la République des moteurs, c’est toujours le ridicule qui fait le plein.