N° 74 du Canard Enchaîné – 28 Novembre 1917
N° 74 du Canard Enchaîné – 28 Novembre 1917
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Un ministère homogène
Un ministère aux allures de clone, des plumes qui se défendent bec et ongles contre la calomnie, et un Tigre qui s’installe partout à la fois : l’édition du 28 novembre 1917 du Canard enchaîné brosse un portrait mordant de Clemenceau. À travers le crayon de Gassier et la plume des rédacteurs, on découvre un pouvoir concentré, une presse sous pression, et une République qui cherche son souffle entre soupçons et coups de griffe.
Un ministère homogène – Clémenceau a nommé son gouvernement avec de faibles personnalités, pour mieux le contrôler. Fameux dessin de HP Gassier – Vieille chanson, dessin de Depaquit –
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L’édition du 28 novembre 1917 du Canard enchaîné s’ouvre sur un triptyque savoureux où Clemenceau, tout juste revenu aux affaires, se retrouve omniprésent. Non content d’avoir repris la présidence du Conseil et le portefeuille de la Guerre, le Tigre est ici représenté comme le seul visage possible de l’exécutif. Le dessin de Gassier, intitulé « Un ministère homogène », pousse la caricature à son comble : quelle que soit la fonction — Justice, Marine, Finances, Intérieur ou Travail —, c’est toujours la même moustache drue et la même mine féroce qui s’imposent. Homogénéité parfaite : Clemenceau est désormais tous les ministres à la fois, condensant en une seule silhouette l’idée d’un pouvoir resserré autour de sa poigne.
Ce trait graphique trouve un écho immédiat dans les articles voisins. « Et nous aussi ! » revient sur l’affaire Malvy et les accusations diffuses qui enveniment la presse. Le Canard, solidaire dans son rôle de cible favorite, rappelle qu’il a lui aussi été calomnié, associé par insinuation à Bolo et aux complots de l’ennemi. Dans cette atmosphère saturée de soupçons, la revendication de justice et de clarté résonne d’autant plus fortement : comme Malvy réclame un tribunal, le Canard exige à son tour que la lumière soit faite. La formule ironique, jouant sur la « basse-cour » à laquelle le palmipède se rattache, vient contrebalancer la gravité de l’enjeu : il s’agit bien de la liberté de la presse et de la légitimité du débat public en temps de guerre.
Enfin, « La Situation » d’Alfred Quapapu prend le pouls politique de la semaine et souligne la transformation immédiate apportée par Clemenceau. Les scandales semblent déjà se tasser — l’affaire Bolo s’enlise, Humbert et Duval passent au second plan, Almereyda est définitivement écarté. La stabilité revient, et avec elle un regain d’efficacité gouvernementale. L’éditorial conclut sur un ton presque triomphal : là où Diogène cherchait un homme, Poincaré l’aurait trouvé en la personne du Tigre.
Ces trois pièces, mises côte à côte, dessinent un portrait cohérent du moment. D’un côté, la presse satirique revendique son droit à exister malgré la suspicion généralisée ; de l’autre, elle met en scène Clemenceau comme l’homme providentiel, capable de personnifier tout un gouvernement. Entre ironie graphique et commentaires plus graves, le Canard capture ce basculement de novembre 1917 où l’autorité du Tigre commence à s’imposer, autant par sa figure que par sa capacité à absorber — ou à écraser — toutes les voix discordantes.

 
      



