N° 757 du Canard Enchaîné – 31 Décembre 1930
N° 757 du Canard Enchaîné – 31 Décembre 1930
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31 décembre 1930 — Le nouveau jeu du Canard
Un plateau pour tourner en rond avec Tardieu, Oustric et compagnie
Pour clore une année de scandales, Le Canard enchaîné sort son “jeu de lois” maison, signé Guilac : un parcours où les ministres glissent de la Bourse à la Banque Oustric, de la “Snia Viscosa” au “Non-Lieu”. En 63 cases, la satire résume 1930 : une République qui rejoue toujours la même partie… avec des dés truqués.
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Le Jeu de Lois, du Canard et du Financier
Pour son dernier numéro de 1930, Le Canard enchaîné offre à ses lecteurs un cadeau d’un genre bien particulier : un jeu de société politique, dessiné et légendé par Henri Guilac, intitulé « Le Jeu de Lois, du Canard et du Financier ». Sous ses airs ludiques, cette planche satirique condense toute l’année écoulée, dominée par les scandales financiers et la déroute morale du gouvernement Tardieu. C’est à la fois une rétrospective humoristique, une charge politique et un bilan de crise. En lieu et place de l’oie traditionnelle, c’est la République elle-même qui tourne en rond — et s’enlise dans les cases boueuses du pouvoir et de la finance.
Le dessin reproduit le plateau d’un jeu de l’oie, mais revisité à la sauce Canard. On y retrouve les grands acteurs du feuilleton politico-financier de l’année : Oustric, le banquier failli devenu symbole de la corruption ; Raoul Péret, garde des Sceaux contraint à la démission ; Camille Aymard, “honnête homme” récompensé par le “prix Oustric” ; Gaston Vidal, politicien opportuniste ; et, bien sûr, André Tardieu, président du Conseil, qui s’efforce de garder la tête hors de la vase. La première case — la “Bourse” — donne le ton, et la soixante-troisième, qui clôt la spirale, s’intitule ironiquement “Commission d’enquête”, comme si l’on ne sortait jamais du cycle des révélations et des faux-semblants.
Chaque étape du jeu renvoie à un épisode réel de l’année 1930. La case “Snia Viscosa” évoque la faillite de la société textile italienne liée à Oustric ; celle du “Non-Lieu” rappelle l’issue attendue des affaires judiciaires promises à s’éteindre dans l’oubli ; plus loin, la “Tirelire” symbolise la caisse noire des spéculateurs, tandis que “Justice” et “Palais de Justice” sont deux cases successives qui ramènent… au point de départ. On y croise aussi le “Canard”, l’“Eau trouble”, la “Caisse fermée” et même le “Gendarme” : autant d’étapes où les joueurs, c’est-à-dire les politiciens, pataugent dans le ridicule ou la compromission.
L’humour de Guilac tient dans le détail et la mécanique du jeu : on “saute” les cases les plus vertueuses pour tomber sur celles du pot-de-vin ; les “marécages” remplacent les auberges ; et les instructions de la légende détournent les règles classiques. “Celui qui arrive au numéro 7 (Raoul Péret) revient naturellement au numéro 6 (Banque Oustric)”, lit-on avec jubilation. Plus loin, “celui qui tombe sur le ‘pot aux roses’ retourne au numéro 39 (M. Gaston Vidal)”. Impossible de mieux résumer la politique française : tout finit par tourner en circuit fermé.
En refermant cette année scandaleuse par un “jeu de lois” — c’est-à-dire un jeu de dupes —, Le Canard prouve une fois encore son génie corrosif. Derrière la farce, il dresse le constat d’une République en mode Monopoly, où les dés sont pipés et les perdants toujours les mêmes. Ce “nouveau jeu du Canard”, comme le dit la règle, “n’a pas de fin, mais beaucoup de relances” : métaphore parfaite d’un système politique où les crises s’enchaînent sans jamais se résoudre.
Le rire, en ce 31 décembre 1930, tient lieu de résolution : continuer à jouer, malgré tout — mais sans jamais cesser de se moquer.
Le Jeu de Lois, du Canard et du Financier
Jeu de 63 cases numérotées, en spirale, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, centripète et contenu dans la quatrième page du journal. Sur la page, au dessus du jeu :
La règle de ce nouveau jeu est toute semblable à celle du classique Jeu de l'Oie, sauf qu'elle en est exactement le contraire.
Il s'agit, en effet, partant de la case 0 (bourse) de ne pas arriver à la case 63 (Prison de la Santé). Le joueur qui par le hasard des dés arrive le premier à cette case 63 perd la partie et paie la mise à tous les autres joueurs.
Le nouveau Jeu du Canard comporte comme son ancêtre des Accidents, c'est-à-dire que l'arrivée dans certaines cases précipite fâcheusement la marche du joueur dans la direction du fatal numéro 63.
Voici quelques exemples:
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Comme on le voit, Le Nouveau Jeu du Canard est d'une simplicité enfantine et il n'est pas douteux qu'il fasse fureur cet hiver aussi bien dans les familles que dans le milieux boursiers et parlementaires.





