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N° 788 du Canard Enchaîné – 5 Août 1931

N° 788 du Canard Enchaîné – 5 Août 1931

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5 août 1931 — Tardieu, héros national de la vie chère

Quand Pierre Bénard fait de l’économie une farce patriotique

Alors que le prix du pain baisse, scandale ! André Tardieu veille à sauver le prestige français : fermeture des magasins affichant des rabais, procès pour “provocation à la baisse”, et loi promise contre toute diminution des prix. Dans un pastiche féroce, Pierre Bénard renverse la logique du pouvoir : en 1931, la France lutte non contre la misère, mais contre la prospérité.

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La prospérité continue - M. André Tardieu lutte énergiquement contre la baisse du prix de la vie

Le 5 août 1931, Le Canard enchaîné publie dans sa page 3 un article signé Pierre Bénard, au titre jubilatoire : « M. André Tardieu lutte énergiquement contre la baisse du prix de la vie ». Derrière cette ironie cinglante, Bénard tire à boulets rouges sur la politique économique du président du Conseil, André Tardieu, qu’il décrit comme l’incarnation d’une France de rentiers, sourde à la misère, obsédée par la “valeur” de ses prix plutôt que par le sort de ses citoyens.

Nous sommes à l’été 1931, dans la tourmente de la grande crise mondiale. Les États-Unis, frappés depuis 1929, ont exporté la déflation sur le Vieux Continent. Les cours agricoles s’effondrent, la production industrielle chute, les salaires stagnent ou diminuent. En France, où la crise se fait sentir plus tard qu’ailleurs, le gouvernement Tardieu, au lieu de soutenir la consommation, choisit de défendre bec et ongles la “valeur du franc” et le revenu des producteurs. Dans ce contexte, l’article de Bénard apparaît comme un chef-d’œuvre de satire économique, un pastiche si absurde qu’il en devient prophétique.

Le ton est donné dès les premières lignes : “La France, encore une fois, l’a échappé belle. Figurez-vous qu’à la suite de manœuvres sur lesquelles la justice va avoir à faire la lumière, le prix du blé a baissé et, par contre-coup, le prix du pain !” L’horreur, selon Bénard, c’est qu’un produit essentiel ait pu devenir moins cher — une “atteinte au prestige national” ! Cette inversion du bon sens nourrit tout l’article, construit sur une ironie au second degré qui ridiculise la rhétorique officielle : “La France ne baissera pas ses prix devant ceux de l’étranger. Haut les cœurs et haut les cours, restera la devise de tous les vrais patriotes.”

Le “héros” de cette farce, André Tardieu, est présenté comme un général livrant bataille au bon marché. Son “projet de loi contre la baisse des prix” punit de travaux forcés quiconque “se permettra de faire baisser n’importe quoi”. Le comique vient du style administratif poussé à l’absurde, où chaque phrase bureaucratique se retourne contre la logique qu’elle prétend servir : “En vertu de ces instructions, un magasin annonçant ‘rabais importants’ a été aussitôt fermé par autorité de police.”

Derrière la caricature, Bénard vise juste. Le gouvernement Tardieu, dernier avatar de la droite libérale d’avant 1932, refuse toute intervention sociale. Obsédé par la “stabilité”, il laisse s’installer la récession, au nom d’une prospérité factice : “Le pain doit être cher. Le vin doit être cher. En dehors de cela, point de salut.” La punchline, qui clôt un paragraphe d’anthologie, résume à elle seule la philosophie économique de l’époque : mieux vaut une nation ruinée mais digne qu’un peuple nourri mais suspect de laxisme.

Le journaliste n’épargne pas non plus le cynisme d’une élite politique qui confond patriotisme et profit. “S’ils n’ont pas les moyens de payer, ils ne sont pas dignes d’être Français”, écrit-il, reprenant la logique implicite des discours du pouvoir. Dans ce renversement du bon sens, les spéculateurs deviennent des “honnêtes gens”, et les consommateurs, des traîtres à la patrie.

Enfin, la chute, d’une ironie mordante, fait de Tardieu un nouveau Poincaré : “Grâce à M. Tardieu, à qui l’on doit déjà ce bienfait qu’est le Traité de Versailles, notre chère France restera envers et contre tous la France chère.”
Le mot “chère”, dans son double sens — coûteuse et adorée —, résume tout le génie de Bénard. Il moque la France des “valeurs” figées, incapable de comprendre que la prospérité se mesure non pas au prix du blé, mais au niveau de vie de ses citoyens.

À travers cet article, Le Canard transforme la chronique économique en satire sociale. Il annonce, sous le rire, la faillite d’un système qui allait s’écrouler deux ans plus tard, lorsque le franc “fort” deviendrait trop lourd à porter pour la République elle-même.