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N° 891 du Canard Enchaîné – 26 Juillet 1933

N° 891 du Canard Enchaîné – 26 Juillet 1933

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La dernière étape du Tour de France a été gagnée par M. Henri Desgrange

Le 26 juillet 1933, Le Canard enchaîné clôt le Tour de France à sa façon : en offrant la victoire… au directeur du Tour, Henri Desgrange. Dans un billet féroce, Drégerin tourne en dérision le culte du sport-spectacle, la hiérarchie patronale et la morale du sacrifice. Sous la farce des cyclistes épuisés, c’est toute une France docile et usée qu’il dépeint — celle où l’effort glorifié masque la misère ordinaire. Un maillot jaune de l’hypocrisie taillé sur mesure pour le “chef de route”.

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Chaque numéro ou journal anniversaire, peut être inséré dans une pochette cadeau au choix, d’un très beau papier pur coton, comportant une illustration originale spécialement réalisée pour COUAC ! par Fabrice Erre ou Laurent Lolmede, ou pour les premiers lecteurs du Canard Enchainé par Lucien Laforge.

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Enchâssé entre deux feuilles d’acrylique (plexiglass extrudé*) il s’exposera aux regards sous son plus beau jour.

Les propriétés anti-UV de ce plexiglass de 2 mm lui assureront une conservation optimale limitant le jaunissement.

Le maintien entre les deux plaques, avec 8 petites pinces nickelées, supprime la vue des plis ainsi que leurs effets indésirables. Les marges autour du journal sont de 2 cm et sont ajustées au format de l’édition, qui a varié au fil des décennies.

*Transparence, légèreté, résistance aux chocs et aux UV

Cette présentation est déclinée en 2 options :

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Quand Le Canard met le Tour sur roulettes : Desgrange, despote de la pédale

Le 26 juillet 1933, Le Canard enchaîné publie à sa une un article signé Drégerin, consacré à la fin du Tour de France. Son titre est déjà une flèche : « La dernière étape du Tour de France a été gagnée par M. Henri Desgrange ».
Sous des dehors humoristiques, ce billet est un réquisitoire en règle contre le culte du sport-spectacle, la tyrannie du patron et la bêtise hiérarchique qui gouverne la compétition.

À travers la figure autoritaire de Henri Desgrange, créateur et directeur du Tour, Drégerin dénonce le cynisme d’un monde où les champions ne sont que des pions, où la souffrance se monnaie en publicité — et où le triomphe du directeur vaut pour celui de la nation tout entière.


Desgrange, empereur du vélo et roi des forçats

Henri Desgrange règne sans partage sur la Grande Boucle depuis 1903. Ancien coureur cycliste, devenu rédacteur en chef du quotidien L’Auto (ancêtre de L’Équipe), il a inventé le Tour pour doper les ventes du journal.
Mais sous la plume du Canard, le ton est tout sauf admiratif : Desgrange y apparaît comme un petit dictateur, un “chef de guerre” aux moustaches sportives, plus préoccupé de son autorité que de ses coureurs.

“Très en forme, M. Henri Desgrange ne paraissait pas avoir trop souffert de ses 4.395 kilomètres.”

D’entrée, Drégerin ridiculise la mise en scène : le directeur, confortablement installé dans les bureaux de L’Auto, se proclame vainqueur moral du Tour qu’il n’a pas couru.
Pendant que les cyclistes rampent dans la poussière, lui “donne l’ordre d’introduire ces messieurs” — les vainqueurs épuisés, tremblants, qui viennent réclamer leurs primes.

Mais la scène tourne à la farce : Desgrange, paternaliste et cruel, leur répond qu’ils n’ont qu’à revenir un autre jour. Et surtout, qu’ils se considèrent heureux d’avoir participé à “une course de voitures d’enfant”.


Les forçats de la route et le capitalisme du spectacle

Derrière l’humour, Drégerin vise juste : il met à nu la logique de surexploitation qui régit déjà le sport professionnel.
Les cyclistes, que le Canard surnomme volontiers les “forçats de la route”, sont ici transformés en figurants d’une grande messe publicitaire dont L’Auto tire toute la gloire.
Ils n’ont ni repos, ni reconnaissance, ni salaire digne — mais la fierté nationale s’en porte à merveille.

“Vous prétendez être payés, maintenant ? Après un Tour de France comme celui-là !”

Cette réplique prêtée à Desgrange résume la morale de l’époque : la souffrance est un honneur, la fatigue une vertu, la misère un spectacle.
Le Canard raille cette idéologie du mérite qui glorifie la douleur, ce “culte de la performance” qui n’est encore qu’à ses débuts mais déjà redoutablement moderne.


Un Tour à l’image de la France des années 30

En 1933, la France sort meurtrie de la crise économique. Le chômage bat des records, les tensions sociales grondent, et la montée du fascisme en Europe commence à inquiéter les démocrates.
Dans ce contexte, le sport devient un exutoire national : il canalise les frustrations, célèbre l’effort et exalte l’ordre.
Henri Desgrange, militariste convaincu, s’inscrit parfaitement dans cette logique. Il rêve d’un Tour de France où “l’homme seul” se dépasse jusqu’à la rupture, sans révolte ni revendication — un idéal d’obéissance, de sacrifice et de virilité.

Drégerin, lui, inverse le mythe :

“Le prochain Tour de France, qu’on se le dise, ne ressemblera pas à celui qui vient de se terminer — et dont se gaussera, quelques semaines encore, le monde qui nous guette.”

La conclusion est d’une lucidité mordante : ce “monde qui guette”, c’est celui de la propagande, du chauvinisme, de la discipline aveugle. Le Canard pressent que le spectacle sportif, derrière sa légèreté apparente, est en train de devenir une machine à formater les consciences.


L’humour, arme de salubrité

Drégerin ne prêche pas : il détourne la solennité du reportage sportif pour en faire une farce de bureau.
Les cyclistes y comptent leurs billets mouillés, les employés se battent à coups de chaises, Desgrange gesticule et tonne.
Le dessin, signé Guilac, appuie la satire : on y voit le directeur faisant rempart de son corps devant le coffre-fort, tandis que les coureurs affolés réclament leurs dus.

Tout le texte repose sur un décalage entre le ton triomphal du Matin ou de L’Auto et la réalité crue : la victoire n’appartient qu’à celui qui n’a pas pédalé.
Dans le rire de Drégerin perce la colère du Canard : le sport, lorsqu’il devient industrie, ne célèbre plus la noblesse de l’effort, mais l’arrogance du patronat.


Le Tour comme miroir de la société

Ce pastiche journalistique ne vise pas seulement Desgrange : il s’attaque à toute une culture du chef, très française, qui s’étend alors des usines aux bureaux de presse.
Le Tour n’est qu’une parabole : la hiérarchie, la discipline, la docilité récompensée par des primes misérables.
Quand Desgrange déclare, faussement paternel, “Débarrassez-moi le plancher”, il parle comme un patron face à ses ouvriers.
Et quand il ajoute que les primes seront payées “un autre jour”, il résume en une phrase le rapport entre capital et travail.

Ce que Drégerin expose avec humour, c’est la continuité entre le sport et la société industrielle, où l’on exalte le courage pour mieux exploiter la fatigue.


Un rire prophétique

L’article paraît léger ; il annonce pourtant un tournant.
Dans les années 1930, Le Canard pressent que le sport de masse va devenir l’un des opiums modernes : un théâtre où se rejoue la domination sociale, et où l’on apprend à applaudir ceux qui dominent.

Henri Desgrange y figure comme un prototype : autoritaire, patriote, paternaliste — le manager avant la lettre.
Drégerin lui décerne ironiquement le maillot jaune du cynisme.