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N° 897 du Canard Enchaîné – 6 Septembre 1933

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M. André Tardieu est acclamé en Espagne

Le 6 septembre 1933, Le Canard enchaîné publie une “dépêche” signée Drégerin : « M. André Tardieu est acclamé en Espagne ».
Sous les apparences d’un reportage madrilène, c’est une pure démolition : un portrait féroce d’un ex-chef de gouvernement en tournée d’ego.
Accompagné d’un dessin savoureux de Guilac, l’article ridiculise le “génie méconnu” de la droite française, devenu orateur sans auditoire.
Entre fausse gloire et vraie solitude, Drégerin signe une satire exemplaire du vide politique d’une Troisième République à bout de souffle — où les rires du Canard sonnent déjà comme un glas.

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André Tardieu “acclamé en Espagne” : Drégerin ou l’art de l’enterrement ironique

Le 6 septembre 1933, Le Canard enchaîné consacre sa une à un nouveau morceau d’ironie politique signé Drégerin, accompagné d’un dessin de Guilac.
Le titre, faussement triomphal, « M. André Tardieu est acclamé en Espagne », annonce dès les premières lignes la tonalité du texte : un enterrement en musique pour un ancien chef de gouvernement devenu symbole de l’échec, de la vanité et du ridicule de la droite française des années 1930.


Le contexte : Tardieu, le “génie méconnu” du naufrage

À cette date, André Tardieu (1876-1945) n’est plus aux affaires depuis un an et demi.
Trois fois président du Conseil entre 1929 et 1932, il a vu sa carrière s’effondrer sous le poids de la crise économique, de la corruption et de son propre orgueil.
Journaliste devenu ministre, élève de Clemenceau, Tardieu se rêvait en “rénovateur” de la République, mais il a laissé le souvenir d’un homme cassant, autoritaire et isolé — un précurseur du technocrate vaniteux qui confond réforme et mépris des autres.
En 1933, il se met à publier des articles rageurs contre le “Cartel des gauches” et à prononcer des conférences en Europe : une tournée de prestige destinée à prouver qu’il n’est pas politiquement mort.

Drégerin ne manque pas de s’en moquer.
Sous couvert d’un faux reportage madrilène, il décrit l’arrivée d’un Tardieu acclamé par une foule… qu’il est seul à entendre.

“À peine eut-il posé le pied sur le sol de la capitale, l’enthousiasme avec lequel son porteur de bagages se jeta sur lui fut délirant.”

L’effet est irrésistible : le triomphe de Tardieu se réduit à un pourboire donné à un garçon d’hôtel.


Une satire de la vanité politique

Le texte, d’un humour dense et cruel, transforme la tournée espagnole de Tardieu en opérette diplomatique.
Chaque phrase mine la solennité de l’homme politique en la ramenant à un grotesque de situation.
À Madrid, dit Drégerin, l’ancien président du Conseil “n’a pas manqué de se régler d’une demi-douzaine de ces fines plaisanteries de chasseur à pied rengagé”, pendant que ses interlocuteurs se demandent s’ils doivent rire ou fuir.

La chute de la scène est exemplaire :

“Dites donc, mes garçons, vous pourriez rire, peut-être… Quoi ? Vous ne comprenez pas ? Vous n’avez pas besoin de comprendre, mais au moins, riez !”

Ce Tardieu qui exige qu’on l’applaudisse même incompris résume tout un type : l’orateur hors-sol, persuadé d’incarner la France, mais incapable de parler à personne.
Drégerin le compare à ces politiciens qui, faute de public, “organisent leur propre tournée publicitaire”.
La charge vise aussi la presse de droite — Le Journal des Débats, La Liberté — qui continue à l’encenser, alors que plus personne ne l’écoute.


L’Europe vue par le Canard : satire sans frontières

L’Espagne de 1933 n’est pas choisie au hasard.
La Deuxième République espagnole, proclamée en 1931, est alors en pleine tourmente : crise sociale, divisions politiques, montée des extrêmes.
Le pays devient un miroir grossissant des tensions françaises.
En situant Tardieu à Madrid, Drégerin évoque avec ironie le nationalisme français en exil intérieur, cherchant à s’exporter faute de convaincre chez lui.
Mais le ton reste léger : le texte se déploie comme une fausse dépêche diplomatique, truffée de détails absurdes (“l’hôtel où se tenaient des biographes pieux du requin”) et de clins d’œil à l’actualité du Canard.

Le dessin de Guilac complète la charge : on y voit un Tardieu satisfait, valise et sac de golf en main, au milieu d'une foule espagnole s'éparpillant comme des mouches.
La caricature transforme le “homme d’État” en touriste prétentieux, plus préoccupé de son allure que de sa mission.


Le “dandy de la politique” selon Drégerin

Au-delà de la moquerie, Drégerin saisit quelque chose de fondamental : la transformation du politique en spectacle.
Tardieu, écrivain et rhétoricien, incarne une génération de dirigeants pour qui la parole publique est devenue auto-célébration.
Il se veut l’héritier de Clemenceau, mais il en a perdu la vigueur populaire ; il cultive l’image du surhomme intellectuel, mais il en montre surtout la vanité.
“Une politesse en appelant une autre”, écrit Drégerin, “M. André Tardieu s’apprête à entreprendre une série de conférences à l’intention des Espagnols reconnaissants.”
Le “remerciement” devient une boucle sans fin de compliments creux — une Europe de salon, ridicule et décadente, à mille lieues du réel.

Dans un dernier trait, Drégerin évoque les futurs “succès” à venir : après Madrid, peut-être Berlin, peut-être Moscou — puisque, dit-il, “après tout, M. Herriot est bien allé à Moscou”.
Le Canard renvoie ainsi dos à dos les deux anciens rivaux : Herriot, le radical qui rêve d’un rapprochement avec l’URSS, et Tardieu, le conservateur qui s’invente des triomphes à l’étranger.
Tous deux deviennent les deux faces d’une République épuisée, trop bavarde, trop fière, et déjà sur la pente du discrédit.


L’humour comme diagnostic politique

Sous l’apparente légèreté, Drégerin livre un texte d’une lucidité politique rare.
L’année 1933 voit naître en Europe un nouvel ordre autoritaire : Hitler au Reich, Dollfuss en Autriche, Franco encore dans l’ombre mais déjà prêt à surgir.
Face à cela, les dirigeants français semblent s’abandonner à la gesticulation et à l’autosatisfaction.
Tardieu devient ainsi le symptôme du vide démocratique : un homme qui parle pour ne rien dire, entouré de journalistes flatteurs et d’un public lassé.
Le Canard, par le rire, en fait le symbole d’une classe politique qui s’enivre de sa propre image pendant que le monde bascule.