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N° 903 du Canard Enchaîné – 18 Octobre 1933

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« Faisons payer le lampiste ! », par Pierre Bénard

Le Canard enchaîné a vu la création, dans ses colonnes, de personnages devenus familiers, voire célèbres. Citons, par exemple, « le Bouif » de Georges de la Fouchardière, ou « l’ami Bidasse » d’André Guérin. Mais celui du « lampiste » est sans doute le plus fameux, car toujours utilisé. Le lampiste apparaît pour la première fois dans le numéro 856 du 23 novembre 1932, à propos d’une tentative d’attentat ferroviaire des indépendantistes bretons de Célestin Lainé contre Edouard Herriot. Mais c’est le titre de l’article de Pierre Bénard, paru dans ce numéro 903 du 18 octobre 1933 qui va le populariser, avec l’expression: « faisons payer le lampiste » !

A la base, le lampiste est un modeste employé des chemins de fer, préposé à l’entretien des lampes. Il va personnifier le français moyen, sorte de bouc émissaire, à qui on demande de se serrer la ceinture toujours davantage, bref celui qui trinque à la place des nantis.

SP

Couac ! propose ses canards de 3 façons au choix

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Chaque numéro ou journal anniversaire, peut être inséré dans une pochette cadeau au choix, d’un très beau papier pur coton, comportant une illustration originale spécialement réalisée pour COUAC ! par Fabrice Erre ou Laurent Lolmede, ou pour les premiers lecteurs du Canard Enchainé par Lucien Laforge.

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Enchâssé entre deux feuilles d’acrylique (plexiglass extrudé*) il s’exposera aux regards sous son plus beau jour.

Les propriétés anti-UV de ce plexiglass de 2 mm lui assureront une conservation optimale limitant le jaunissement.

Le maintien entre les deux plaques, avec 8 petites pinces nickelées, supprime la vue des plis ainsi que leurs effets indésirables. Les marges autour du journal sont de 2 cm et sont ajustées au format de l’édition, qui a varié au fil des décennies.

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Cette présentation est déclinée en 2 options :

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Le 18 octobre 1933, Le Canard enchaîné publie une fausse dépêche de Berlin signée Jules Rivet : « Tout va bien en Allemagne ».
Sous un humour ravageur, il démonte la farce du plébiscite hitlérien et dévoile le vrai visage du nouveau régime.
Entre faux décret et vraies horreurs, Rivet décrit un pays “calme” où voter “non” entraîne la stérilisation immédiate.
Une satire visionnaire : six ans avant la guerre, Le Canard montre déjà que le rire peut être une forme de résistance.

« Tout va bien en Allemagne » : quand Jules Rivet démasque la farce du plébiscite hitlérien

À l’automne 1933, Le Canard enchaîné ne se fait plus d’illusions sur la nature du nouveau régime allemand. Moins de neuf mois après la nomination d’Hitler comme chancelier, la dictature se met en place avec une méthode implacable : propagande, élimination des opposants, contrôle total des médias, embrigadement de la société.
Mais en France, une partie de la presse continue de croire — ou de feindre de croire — à une “normalisation” de la vie politique outre-Rhin. Le Canard, lui, choisit l’arme du rire pour dire l’horreur.

Le 18 octobre 1933, sous le titre « Tout va bien en Allemagne », Jules Rivet signe une fausse dépêche de Berlin qui tourne en ridicule le plébiscite organisé par Hitler pour “ratifier” son retrait de la Société des Nations. Derrière le ton léger, une satire féroce du totalitarisme naissant, observé avec une lucidité glaçante.


Le prétexte : un “vote libre” à sens unique

Le 12 novembre 1933, les Allemands sont officiellement appelés à voter pour approuver — ou non — la politique du Führer.
Mais dès la parution de l’annonce, Le Canard a compris la manœuvre : le scrutin n’est qu’un théâtre de papier, une démonstration de plébiscite à la napoléonienne.
Rivet s’en amuse en parodiant un texte de loi imaginaire, dont l’ironie décape toute illusion démocratique :

“Chaque électeur recevra librement deux bulletins : l’un portant la mention oui, l’autre portant la mention non.”

Suit l’article 2 :

“Il est absolument interdit de se servir du bulletin portant la mention non.”

Et pour finir, l’article 3 :

“Tout électeur qui se risquerait à voter non serait immédiatement déclaré impropre aryen et stérilisé.”

Tout le génie de Rivet est là : il n’accuse pas, il expose l’absurde. En trois phrases, il transforme la mécanique totalitaire en une comédie noire. Ce que la diplomatie européenne s’obstine à ne pas voir, le Canard l’explique en un éclat de rire.


Un Berlin de carton-pâte

La chronique feint de rapporter, sur un ton paisible, la vie quotidienne d’un Berlin où “la plus grande tranquillité n’a cessé de régner”.
Les habitants, nous dit Rivet, “marchent au pas de l’oie en allant coller les affiches officielles”, puis “rentrent chez eux après en avoir sollicité l’autorisation”.
Les “marchands d’habits aussi” font fortune : “on se déchire les manches de veste en élevant le bras pour le salut régulier”.

La satire est redoutable de précision : la propagande nazie, omniprésente, infiltre les gestes les plus banals. Même la mode devient signe d’allégeance.
Rivet joue du contraste entre le calme apparent et la folie sous-jacente : la ville est calme, mais c’est le calme du cimetière.

La parodie d’un décret hitlérien parachève cette atmosphère kafkaïenne : les résultats du plébiscite seront “proclamés quelques jours avant le vote, afin d’éviter toute contestation”.
Quant aux “bruns” — les SA —, “ils se seraient fait oxygéner pour être soigneusement dépistés” : un trait d’humour qui vise la prétendue pureté raciale et l’obsession eugéniste du régime.


Rire pour dénoncer l’aliénation

Sous la farce, l’analyse politique est implacable.
En octobre 1933, Hitler vient d’annoncer le retrait de l’Allemagne de la Société des Nations et de la Conférence du désarmement. Ce “coup d’éclat” isole son pays, mais il le présente à la foule comme un acte de fierté nationale.
Le Canard comprend immédiatement que ce plébiscite n’est pas une élection, mais un outil de propagande destiné à légitimer le Führer.

Le passage le plus mordant du texte fait dire à Rivet que, grâce à “ces sages dispositions”, l’Allemagne “sera bientôt si haut qu’il ne sera plus possible de la voir à l’œil nu”.
La métaphore est superbe : le nationalisme allemand, dans sa fureur de grandeur, devient une fusée absurde filant vers le néant.

Il conclut par une image grotesque et terrible : après le vote, les Allemands “pourront reprendre leurs occupations habituelles : faire de la marche à pied avec un sac américain sur le dos, organiser des concerts, ramasser les papiers gras…” — autrement dit, continuer à obéir.


Un humour qui démasque le tragique

La signature de Jules Rivet est synonyme d’élégance et de cruauté feutrée.
Loin des imprécations ou du ton grave, il pratique un humour de précision, où chaque tournure redouble la satire.
Sa “dépêche” est truffée de clins d’œil :

  • la mention de Charles Maurras et de Cécile Sorel — allusion à la fascination d’une partie de la droite française pour Hitler ;
  • la description du vieux Kaiser à Doorn, “sciant du bois” tandis qu’on prépare le plébiscite : image d’une Europe qui bricole son cercueil.

Cette ironie, en 1933, a la force d’un cri.
Alors que la plupart des journaux français traitent Hitler avec prudence, Le Canard ose la moquerie frontale.
Rivet ne parle pas d’un régime inquiétant : il montre un régime déjà fou.


De la farce à la prophétie

Six ans avant la guerre, l’article annonce tout : le culte du chef, le plébiscite permanent, l’exclusion raciale, la passivité collective.
Le rire du Canard n’est pas une fuite, mais une arme.
En octobre 1933, Jules Rivet n’écrit pas seulement une chronique : il dresse l’acte de naissance du totalitarisme.


 

Souvenirs, par A. Breffort