N° 211 du Canard Enchaîné – 14 Juillet 1920
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La Fête nationale célébrée avec enthousiasme – Le programme général des réjouissances
Le 14 juillet 1920, deux ans après l’armistice, la République promettait une Fête nationale « célébrée avec enthousiasme ». Dans un climat encore marqué par les deuils et les tensions sociales, le Canard enchaîné s’empare du programme officiel pour en souligner les excès, les contradictions et les arrière-pensées politiques. Revue militaire, drapeaux remis aux troupes coloniales, reliques de guerre exhibées comme trophées : plus qu’une fête populaire, c’est la mise en scène d’une victoire instrumentalisée que le journal tourne en dérision.
Ceux qui sont de la revue, dessin de Guilac.
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L’article « La Fête nationale sera célébrée avec enthousiasme », publié dans Le Canard enchaîné du 14 juillet 1920, s’inscrit dans un moment charnière où la République cherche à transformer la mémoire de la guerre en ciment politique. Le Canard décortique, avec ironie, un programme qui, loin d’être une simple célébration populaire, est avant tout une démonstration de force orchestrée par le Bloc national, coalition de droite et de centre-droit arrivée au pouvoir en 1919.
Le Bloc national, dominé par les anciens combattants et les conservateurs, entend imposer une lecture patriotique de la victoire : celle d’une France unie derrière son armée et ses chefs. Le 14 juillet devient un outil idéologique : il ne s’agit pas seulement d’honorer les morts, mais de rappeler que la victoire doit justifier la politique d’après-guerre — réparations imposées à l’Allemagne, maintien d’une armée forte, exaltation de l’ordre social. En insistant sur la « revue de Vincennes » et la présence de Foch, de Millerand et de Deschanel, l’article montre bien comment l’État fait défiler non seulement ses troupes, mais aussi son récit officiel.
Le détail savoureux des trophées — du matériel allemand capturé, des fragments de statue hindoue, jusqu’aux moutons « pris » à l’ennemi — souligne le côté grotesque de cette mise en scène. Le Canard se plaît à juxtaposer le tragique et le trivial : les sacrifices humains de la guerre côtoient des reliques exposées comme dans une foire. Ce mélange dénonce la marchandisation de la mémoire combattante, transformée en spectacle destiné à masquer les tensions sociales.
Car, derrière l’enthousiasme décrété, la France de 1920 est secouée par des conflits : les grèves ouvrières du printemps, la crise de la vie chère, et une profonde fracture entre les élites politiques et les classes populaires. Le Canard laisse transparaître cette dissonance : tandis que le Bloc national ordonne l’enthousiasme, beaucoup de Français subissent encore les conséquences directes de la guerre — pauvreté, chômage, logement précaire.
En dénonçant la « joie officielle » mise en scène par les autorités, le journal satirique révèle la nature politique du 14 juillet : un instrument de propagande patriotique utilisé par le Bloc national pour conforter son pouvoir et faire oublier les revendications sociales. Ainsi, le commentaire du Canard reste d’une grande actualité : il rappelle que les commémorations ne sont jamais neutres, mais toujours le reflet d’un rapport de force.

 
      



